La tension est montée dimanche autour du superpétrolier saoudien piraté le 15 novembre au large de la Somalie, avec un appel lancé aux pirates par les miliciens islamistes shebab à libérer le navire ou faire face à une action armée.

«Si les pirates veulent la paix, ils feraient mieux de libérer le pétrolier», a affirmé à l'AFP cheikh Ahmed, un porte-parole des miliciens shebab pour la région de Harardhere où a été détourné le navire. Les pirates ont exigé jeudi le paiement d'une rançon de 25 millions de dollars pour libérer le Sirius Star qui transporte une cargaison de pétrole estimée à 100 millions de dollars.

Les shebab, qui contrôlent une grande partie de la Somalie, ont concentré ces derniers jours des forces autour d'Harardhere et ont généralement condamné la piraterie, qualifiée d'offense à l'islam.

Un membre des pirates a rétorqué qu'ils ne craignaient pas ces menaces.

«Nous sommes les shebab de la mer et nous n'avons pas peur des shebab de la terre», a ironisé Mohamed Said. «Si quiconque essaye de nous attaquer, ce serait un suicide», a-t-il affirmé à l'AFP.

«Je ne suis pas sur le navire pour l'instant, parce que je coordonne ce qui se passe à terre», a-t-il expliqué. «Il y a une petite avant-garde de shebab sur le terrain, mais nous y avons également une forte présence», a ajouté le pirate.

«Tout Somalien a un grand respect pour le saint royaume d'Arabie saoudite. Nous n'avons rien contre eux, mais malheureusement ce qui s'est passé ce n'est que du business pour nous et j'espère que les Saoudiens le comprendront», a expliqué Mohamed Said qui avait réclamé le paiement de la rançon avant la fin novembre.

Selon certains habitants de la zone, les shebab sont divisés sur la position à tenir et certains miliciens islamistes seraient surtout intéressés par un partage de la rançon éventuelle.

Un membre du groupe de pirates a affirmé samedi à l'AFP que des négociations avaient débuté avec le groupe saoudien Aramco, propriétaire du navire sans qu'elles n'aient pour le moment abouti.

Il a également affirmé que les pirates à bord du Sirius Star riposteraient à toute intervention militaire pour les déloger.

«J'espère que le propriétaire du superpétrolier est suffisamment sage et n'autorisera pas le recours à l'option militaire parce que cela serait un désastre pour tout le monde. Nous sommes là pour défendre le superpétrolier si nous sommes attaqués», a ajouté Abdiyare Moalim.

Une centaine de miliciens armés ont déjà convergé depuis jeudi sur Harardhere, un petit port de pêche à 300 km au nord de Mogadiscio où le supertanker est ancré depuis mardi.

La capture du Sirius Star, long de 330 mètres et renfermant dans ses cales 300 000 tonnes de pétrole, est l'opération de piraterie la plus spectaculaire menée au large de la Somalie, où une centaine de bateaux ont été attaqués cette année.

Selon une estimation du ministre kenyan des Affaires étrangères, les pirates qui multiplient les attaques de bateaux au large des côtes somaliennes et dans le golfe d'Aden ont obtenu quelque 150 millions de dollars de rançons au cours des douze derniers mois.

Au moins dix-sept navires - et leurs 250 membres d'équipage - sont toujours aux mains des pirates, notamment un cargo ukrainien avec à son bord 33 tanks.

Plusieurs pays ont déjà dépêché des navires de guerre au large de la Somalie pour lutter contre ces bandits des mers dont l'activité menace l'une des voies maritimes les plus fréquentées au monde, donnant notamment accès au canal de Suez.

La communauté internationale et les acteurs du commerce maritime estiment cependant que la cause profonde de la piraterie au large des côtes somaliennes est l'anarchie qui règne en Somalie, pays de 10 millions d'habitants en guerre civile depuis 1991.