L'ONU a décidé hier d'ajouter 3100 hommes aux effectifs de sa Mission au Congo (Monuc), les portant à 25 000 membres, dont 20 000 soldats. Mais la guerre dans l'est congolais risque de persister, avec ses horreurs et pillages dans les Kivu, et ses effets de blocage dans le reste de l'immense pays.

La raison: la crise du Rwanda, au coeur de la guerre du général tutsi rebelle Laurent Nkunda contre le gouvernement de Kinshasa, continue d'être passée sous silence par les puissants parrains du régime de Kigali.

 

Petite exception hier: Londres, grand bailleur de fonds d'un Rwanda qui vire de plus en plus anglophone, a pressé le régime du général Paul Kagame d'«user de son influence» auprès de Nkunda pour faire cesser les combats au Congo.

Mark Malloch-Brown, secrétaire d'État à l'Afrique, a lâché sa «petite phrase» à son arrivée à Kigali, après trois jours au Congo. «Je vais demander (à Kagame) d'user de son influence» sur Nkunda, a-t-il dit, avant d'être reçu par l'homme fort du Rwanda.

«Mais je ne crois pas que Nkunda est juste une marionnette de Kigali», s'est-il vite ressaisi, évoquant les «racines profondes du conflit» au Congo.

Une guerre rwandaise

Nkunda, un Tutsi congolais formé en Ouganda par le Front patriotique rwandais (FPR) avant d'envahir le Rwanda en 1990, a créé le «Congrès national pour la défense du peuple» en 2006 pour «protéger les Tutsis du Congo».

Dans les faits, il combat les Hutus rwandais réfugiés dans l'est du Congo lors du génocide de 1994, quand Kagame prenait Kigali. Ces Hutus y ont créé les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), regroupant des anciens «génocidaires» et des jeunes exilés.

Kagame a beau tirer sa légitimité du génocide, il se sait menacé par la volonté des Hutus de reprendre le pouvoir au Rwanda. Avec Nkunda, il confine la guerre Tutsi-Hutu au territoire congolais, exige que Kinshasa désarme le FDLR, et insiste que la guerre «est une affaire congolaise, et non rwandaise».

À l'embrasement de l'Est congolais s'est greffé le pillage des énormes richesses du pays (bois, bétail, diamant, or et coltan - téléphonie cellulaire et jeux vidéo), documenté par des experts de l'ONU dans cinq rapports entre 2001 et 2003.

Les Congolais voient la Monuc, après neuf années sur le terrain, comme l'outil des parrains du Rwanda pour gérer le pillage de leur pays. Ils lui sont hostiles. Le président Joseph Kabila, lui, est à Luanda pour demander l'aide de l'Angola.

L'arrestation de Rose Kabuye

Autre signe de pression sur le Rwanda: l'arrestation par l'Allemagne de la chef de cabinet de Kagame, Rose Kabuye, et son extradition à Paris pour accusations liées à la destruction de l'avion du président rwandais Juvénal Habyarimana, déclencheur du génocide en avril 1994.

Pressions dérisoires, vu l'horreur de «l'holocauste tranquille» qui s'abat sur l'est du Congo depuis le génocide rwandais: peut-être 10 millions de civils morts, femmes et filles violées en masse, enfants soldats, pillages et exactions.

C'est un «processus de paix» au Rwanda qui s'impose, avec un plan vérité et réconciliation entre le FPR et le FDLR qui débouche sur des élections libres et justes. Autrement le Rwanda continuera d'alimenter la guerre au Congo, quel que soient les renforts de la Monuc.

La paix dépendra de la «vision» de Barack Obama, qui sera investi président des États-Unis en janvier, lit-on aussi sur le webzine The Daily Voice, sous la plume de Kambale Musavuli, coordonnateur des Friends of the Congo aux États-Unis.

En tête de ses recommandations à Obama pour «corriger les erreurs du passé», il demande «la fin de la carte blanche au Rwanda pour s'ingérer au Congo», et «le lancement d'un processus politique pour démocratiser le Rwanda».

Avec Afp, Ap, Reuters, Bbc, Cnn, Allafrica.com, The Daily Voice