Le président soudanais Omar al-Béchir a annoncé mercredi un cessez-le-feu immédiat au Darfour et appelé au désarmement des milices dans cette région de l'ouest du pays ravagée par la guerre civile depuis 2003.

M. Béchir s'exprimait devant des personnalités internationales à Khartoum, après avoir entendu les recommendations finales de l'initiative pour la paix au Darfour lancée par son régime, censées fournir une base à une conférence de réconciliation au Qatar prévue d'ici la fin de l'année.

Cette «initiative du peuple du Soudan», boycottée par les groupes rebelles, est considérée par les détracteurs du régime comme une tentative pour détourner l'attention sur les accusations de «crimes de guerre» au Darfour, portées contre M. Béchir par le procureur de la Cour pénale internationale (CPI).

«J'annonce solennellement un cessez-le-feu inconditionnel entre les forces armées et les factions en guerre, pourvu qu'un mécanisme de contrôle efficace soit mis en place et soit surveillé par toutes les parties impliquées», a dit M. Béchir, selon une traduction officielle de ses propos en anglais.

Il a également appelé au lancement d'une «campagne immédiate pour désarmer les milices et restreindre l'usage des armes par les forces armées», en référence apparemment à la milice arabe pro-gouvernementale des Janjawids.

«Nous confirmons notre engagement à négocier pour parvenir à des solutions pacifiques qui garantiront l'élimination des conflits», a-t-il poursuivi.

La guerre civile au Darfour, où le gouvernement est accusé d'avoir brutalement réprimé la rébellion, a fait jusqu'à 300.000 morts depuis 2003 selon l'ONU, 10.000 selon Khartoum.

Khartoum cherche à persuader la communauté internationale de son sérieux quant à sa volonté de résoudre le conflit, et convaincre le Conseil de sécurité de l'ONU de différer d'éventuelles poursuites de la CPI à l'encontre de M. Béchir.

Le principal médiateur international pour le Darfour, Djibril Bassole, a félicité le Soudan pour avoir ouvert un dialogue «louable», susceptible de donner un «nouvel élan» aux négociations.

«La fin effective des hostilités constituerait une démonstration sincère de la part des parties belligérentes de leur volonté de dialogue», a-t-il dit lors de la conférence à Khartoum.

Pour des analystes, le Soudan doit traduire ses déclarations en actes, s'il veut obtenir le soutien de l'Occident, de précédentes déclarations de trêve ayant fait long feu.

«On dirait qu'il a commencé à cocher quelques cases, avec le cessez-le-feu inconditionnel, la surveillance de la trêve, mais tout cela doit être plus complet et plus global», a commenté Fouad Hikmat, spécialiste du Soudan pour le groupe de réflexion International Crisis Group. «Je pense qu'il y a beaucoup de chemin à faire».

L'Union africaine et la Ligue arabe ont demandé au Conseil de sécurité de différer toute décision de la CPI, afin d'accorder du temps à M. Béchir pour instaurer un cessez-le-feu.

Les juges de la CPI examinent actuellement les preuves présentées en juillet par le procureur, Luis Moreno-Ocampo, pour décider s'ils vont émettre un mandat d'arrêt international contre M. Béchir.

M. Béchir est accusé de génocide, crimes de guerre et crimes contre l'humanité au Darfour, et d'avoir donné l'ordre à ses forces d'anéantir les groupes non arabes de la région, par le meurtre, la torture, les viols et le pillage.

Le Qatar veut accueillir des pourparlers de réconciliation mais l'un des principaux groupes rebelles du Darfour, le Mouvement pour la justice et l'égalité (JEM), a dit qu'il les boycotterait.

Les autres mouvements rebelles n'étaient pas joignables mercredi.