Le chef rebelle congolais Laurent Nkunda, dont les hommes sont aux portes de la ville de Goma, dans l'est de la République démocratique du Congo (RDC), a menacé de chasser du pouvoir le gouvernement en l'absence de négociations directes, ce que Kinshasa a refusé.

Parallèlement lundi, le secrétaire général adjoint de l'ONU chargé des opérations de maintien de la paix, Alain Le Roy, a prévenu à son arrivée dans la capitale provinciale du Nord-Kivu que le mandat des Casques bleus en RDC prévoyait d'«interdire à des forces armées d'entrer dans Goma».

M. Le Roy, accompagné du chef de la Mission des Nations unies en RDC (Monuc), faisait référence aux hommes de Laurent Nkunda, postés à une quinzaine de km de la capitale provinciale du Nord-Kivu, où les autorités ont décrété un couvre-feu de 23H00 à 05H00 (16 h HNE à 22 h HNE).

«Notre mandat est d'assister les FARDC (Forces armées de RDC) pour protéger les civils», a-t-il ajouté, indiquant travailler «sur un renforcement des forces qui implique un redéploiement pour (les) mettre là où elles sont le plus utiles». Quelque 5500 Casque bleus sont actuellement déployés dans le Nord-Kivu.

Lundi matin, un convoi humanitaire de l'ONU est arrivé sans encombre à Rutshuru, ville de l'est de la RDC en zone rebelle, pour distribuer la première aide depuis une semaine. Sur place, les rebelles ont assuré aux humanitaires qu'ils pouvaient travailler librement dans leur zone.

Plus d'un million de personnes sont actuellement déplacées par les combats entre les rebelles et l'armée congolaise dans la province de l'est du pays.

Dans ce contexte toujours tendu, Laurent Nkunda a réclamé des négociations directes. «Nous voulons une négociation directe avec le gouvernement», a affirmé le général déchu tutsi dimanche dans son fief de Kichanga (environ 80 km au nord-ouest de Goma).

«Si rien est fait, nous allons forcer ce gouvernement à quitter le pouvoir», a prévenu le chef rebelle, qui avait brièvement pris en 2004 Bukavu, capitale de la province voisine du Sud-Kivu.

Les rebelles sont arrivés mercredi aux portes de Goma, infligeant une cuisante défaite à l'armée, avant de décréter un cessez-le-feu unilatéral respecté jusqu'ici.

Mais le gouvernement congolais a rejeté la demande de la rébellion. Il souhaite négocier avec tous les groupes armés opérant dans les Kivu, et pas en tête à tête avec le Congrès national pour la défense du peuple (CNDP) de Laurent Nkunda.

«Il n'y a pas de petits et de grands groupes armés. Le fait de créer un désastre humanitaire ne donne pas de droits spéciaux», a réagi le porte-parole du gouvernement, Lambert Mende.

Plusieurs mouvements armés opèrent dans l'est de la RDC, frontalière du Rwanda et très riche en minerais, depuis le génocide de 1994 au Rwanda.

Le CNDP avait signé en janvier à Goma, avec d'autres groupes congolais, un accord de cessez-le-feu, mais les combats ont repris fin août entre les hommes de Laurent Nkunda et l'armée

C'est seulement dans le cadre du processus baptisé Amani, né de cet accord, que le gouvernement se dit prêt à discuter - ce que refuse Nkunda.

La communauté internationale, qui a dépêché la semaine dernière de nombreux émissaires dans la région, tient une position proche de celle du gouvernement.

Elle a jusqu'à présent insisté sur la nécessité d'appliquer l'accord de janvier, ainsi qu'un autre conclu en novembre 2007 entre Kigali et Kinshasa, qui prévoyait une nouvelle fois le rapatriement au Rwanda de rebelles hutus rwandais qui opèrent dans l'est de la RDC. Ces textes sont restés lettre morte.

L'Union africaine (UA) prépare un sommet régional sur la crise qui pourrait se tenir cette semaine au Kenya.

Laurent Nkunda, qui se présente comme un défenseur de la communauté tutsie, s'est montré évasif sur ses revendications, assurant notamment vouloir le «rétablissement de la sécurité» avec la «traque» des rebelles hutus rwandais et la mise en place d'une forme de fédéralisme dans l'ex-Zaïre.

Lundi, des centaines de déplacés continuaient à regagner la zone de Rutshuru qu'ils avaient fui en début de la semaine dernière au plus fort des combats.