Des milliers de déplacés, affamés, s'entassaient samedi le long de la route principale partant de Goma, capitale du Nord Kivu, tentés de profiter de la trêve pour regagner leur «domicile», le camp de Kibumba, plus au nord.

Regroupés par petites grappes autour d'un poste de radio, ou allongés à même le bas-côté herbeux de la route au niveau de Kibati, à 10 km au nord de Goma, dans l'est de la République démocratique du Congo, ils ont fui pour la plupart lundi un camp de déplacés situé à 20 km plus au nord, à Kibumba, devant les tirs de mortier des rebelles de Laurent Nkunda.Depuis, ces familles survivent, livrées à elles-mêmes, les ONG et autres agences humanitaires de l'ONU n'ayant pu jusqu'à présent leur délivrer une quelconque forme d'assistance.

«Je dors à côté de la route. Je n'ai pas de couverture, pas de bâche. Pour manger, on demande aux populations (locales) mais ce n'est pas suffisant», témoigne, les traits creusés, Simon Tuzere, un cultivateur de 50 ans.

A ses côtés, un jeune homme dépenaillé à la démarche claudicante en raison d'une blessure au pied mal soignée, crie famine.

«Nous n'avons que de l'eau. Cela fait une semaine, sans rien trouver à manger», explique John, 21 ans, lui aussi originaire du camp de Kibumba, désormais en zone rebelle.

A la différence d'autres villageois massés à Kibati, John n'a aucun effet personnel, juste un vieux blouson de cuir sur les épaules.

«Nous avons fui le camp lundi dans la matinée. C'est ce matin-là qu'ils ont commencé à jeter des bombes sur le camp», raconte-t-il.

Paysan, John pense à rentrer au camp de Kibumba, où selon lui, il a plus de chances de trouver de la nourriture.

«Si on sait qu'on retrouvera de la nourriture là-bas, on retournera», affirme-t-il.

L'afflux massif de ces déplacés de Kibumba en début de semaine a également fait peser un poids supplémentaire sur les populations installées à Kibati, mises à contribution pour leur fournir un peu de nourriture.

«Nous-mêmes nous n'avons pas grand-chose. Et nous ne sommes pas contents. Les déplacés viennent dans nos champs pour voler des bananes», explique Shamboko Kavura, robuste villageois de 35 ans, sur le pas de sa maisonnette en bois.

Un adolescent renchérit: «Ils nous ont volé une chèvre et le matériel de maison, les casseroles, les bassines».

Plus au nord sur la route, en direction de Kibumba, des familles reprenaient à pied le chemin de leur camp, rassurées par l'absence de combats dans la zone depuis 48 heures à la suite d'un cessez-le-feu unilatéral décrété mercredi par le général déchu tutsi congolais Laurent Nkunda.

Une fois passé le poste avancé des Casques bleus de la Monuc à Kibati, installé à l'écart de la route, ces familles franchiront quelques km plus loin une ligne de front invisible avant de passer devant une dizaine de rebelles, paisiblement assis à l'ombre.

John, de son côté, a appris que l'aide humanitaire tant attendue pourrait de nouveau être distribuée dans les prochains jours.

«Qu'ils fassent vite!», a-t-il simplement souhaité.