La guerre a repris de plus belle dans l'est du Congo, jetant des milliers de civils sur les routes et emportant le gouvernement Gizenga ainsi que le nouveau chef des Casques bleus, qui tentaient hier, face à la colère populaire, d'empêcher la poussée du général rebelle Laurent Nkunda vers l'importante ville de Goma.

Selon Radio-Okapi, soutenue par l'ONU, le Congrès national pour la défense du peuple (CNDP) de Nkunda, qui dit «protéger les Tutsis» de l'est du Congo, s'est emparé dimanche d'un camp de l'armée congolaise à Rumangabo, et il avait progressé hier jusqu'à 30 km au nord de Goma, capitale du Nord-Kivu.

Alors que des dizaines de milliers de civils, vieillards, femmes et enfants chargés de ballots, fuyaient la zone des combats, des centaines de jeunes hommes se sont attaqués aux bases de la Mission de l'ONU au Congo (MONUC), fracassant des vitres et endommageant des véhicules officiels.

Général démissionnaire

Ils accusaient les Casques bleus de laisser libre cours aux rebelles et de ne pas agir avec assez de force pour protéger la population. Avec 17 000 hommes et un budget de plusieurs milliards, la MONUC est la plus importante mission de paix de l'ONU au monde.

Selon le secrétariat de l'ONU à New York, le général espagnol Vicente Diaz de Villegas, nommé il y a moins de deux mois, a démissionné « pour des raisons personnelles ».

Mais de source diplomatique, on indique que le général estime que la MONUC n'a pas les moyens d'accomplir sa tâche, un avis que partage son patron civil, Alan Doss, représentant spécial de l'ONU en République démocratique du Congo (RDC), comme il l'avait dit au Conseil de sécurité le 3 octobre.

Dans l'attente de la nomination d'un successeur à Diaz, le général ghanéen Ishmeel Ben Quartey assurera l'intérim à la tête de la MONUC, a indiqué l'ONU.

Doss a annoncé hier que la MONUC avait décidé d'utiliser des blindés et des hélicoptères de combat contre les hommes de Nkunda, qu'il accuse d'avoir violé l'accord de paix conclu en janvier dernier.

Selon des dépêches transmises à La Presse par Entraide missionnaire Montréal, de durs combats font rage au nord de Goma, tandis que 20 000 civils ont fui vers le sud. D'après le PAM (Programme alimentaire mondial), 20 0000 civils ont déjà fui leurs maisons depuis la signature de l'accord de janvier 2008.

Gouvernement «de combat»

Cette région de l'est du Congo est le théâtre de la pire crise humaine au monde, avec, selon l'ONU, un demi-million de civils qui meurent chaque année comme victimes directes et indirectes des guerres venues du Rwanda voisin et servant à accélérer le pillage des ressources minières, agricoles et forestières.

Marée humaine en perdition, des milliers de civils se ruaient hier vers Goma, en emportant matelas, casseroles et chèvres, fuyant les combats à l'arme lourde, rapportent des journalistes sur place.

À Kinshasa, le président Joseph Kabila a formé un nouveau gouvernement pour tenter de pacifier l'est du pays. Gouvernement «de combat et de reconstruction», il est dirigé par Adolphe Muzito et compte 54 membres.

Les ministres de la Défense, Chikez Diemu, et de l'Intérieur, Denis Kalume, qui n'ont pu réduire la rébellion de Laurent Nkunda dans l'Est, sont sanctionnés. Ils sont respectivement remplacés par Charles Mwando et Célestin Mbuyu.

Le principal parti de l'opposition a mis en doute la capacité du nouveau cabinet. «On ne voit pas comment ce gouvernement va s'en sortir», a dit le secrétaire général du Mouvement de libération du Congo (MLC), François Mwamba.

À Bruxelles, le Belge Louis Michel, ministre européen à la Coopération et au Développement, a demandé une réunion urgente du Conseil européen sur le Congo.

Avec AFP, AP, Reuters, UPI, Radio-Okapi, BBC, New York Times