Privé de visa aux États-Unis pour son rôle dans les massacres de musulmans en 2002, Narendra Modi, premier ministre de l'État indien du Gujarat, voyage par télévidéo, mais ses critiques, qui l'appellent «le boucher du Gujarat», continuent de se mobiliser contre lui.

Ainsi, Washington ayant maintenu son refus d'un visa, Modi s'est adressé par satellite à la Conférence mondiale des Gujaratis, tenue fin août au New Jersey, leur demandant de soutenir son projet de doter le Gujarat de sa propre loi antiterroriste parce que «les lois fédérales sont trop faibles».

 

Demain soir, il s'adressera, par télévidéo toujours, à une réunion des «Amis canadiens du Gujarat» à Brampton, en Ontario.

Comme ils le font aux États-Unis, des membres de la communauté indienne au Canada opposés à l'intégrisme hindouiste du BJP, le parti de Modi, ont lancé une campagne de courriels et de pétitions.

Harper et le Gujarat

«Ce qui est grave, c'est que le gouvernement Harper vient d'ouvrir un bureau commercial au Gujarat, alors que les libéraux avaient précédemment gelé les liens du Canada avec cet État indien à cause de Modi», a dit Dolores Chew, politologue de Montréal.

La Fondation Canada-Inde (FCI), qui parraine la réunion de Brampton, a félicité Harper pour son initiative.

«Avec un taux de croissance industrielle de 20%, le Gujarat abrite la plus grande raffinerie écologique et la plus importante transformation du diamant au monde», a écrit la FCI dans un communiqué.

«On sait que la firme IBM a fait des affaires avec les nazis, ce n'est pas une raison de l'imiter, a déclaré la professeure Chew à La Presse.Le business as usual n'est pas possible avec le Gujarat de Narendra Modi», a-t-elle ajouté.

«Oui, Modi est un personnage controversé, mais ce n'est pas pour lui que nous parrainons la rencontre de Brampton. On s'est engagés parce que des fonds seront collectés pour un projet d'alphabétisation de filles au Gujarat», a dit à La Presse le porte-parole de la FCI, Manoj Pundit.

Le ministère des Affaires étrangères n'a pas rappelé La Presse.

Massacres de chrétiens

«Qu'il intervienne au Canada par télévidéo ou qu'il tente encore d'avoir un visa, nous continuerons de mobiliser contre les violences sectaires du BJP et de ses filiales», a affirmé Mme Chew, originaire de Calcutta.

En lui refusant un visa diplomatique en 2005, et en lui retirant en même temps son visa d'affaires et de tourisme, les États-Unis ont souligné que Modi s'était «disqualifié» en étant impliqué dans «de graves violations de liberté religieuse».

La Commission indienne des droits humains a épinglé son gouvernement pour «n'avoir pas contrôlé les violations des droits à la vie, à la liberté, à l'égalité et à la dignité» de ses citoyens, dont 2000 furent tués et 150 000 déplacés.

Le BJP lancé demain sa campagne électorale pour le district de Delhi et Modi en sera la vedette «antiterroriste», après les attentats qui ont fait 24 morts samedi.

Mais le parti hindouiste est impliqué en même temps dans des massacres de chrétiens dans plusieurs États. Des organisations hindouistes affiliés au BJP ont imputé ces massacres à «la conversion massive d'hindous par les chrétiens».