Emmanuel Macron et le Premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou commémorent dimanche la rafle du Vel d'Hiv, avant une rencontre officielle à l'Elysée qui sera l'occasion pour les deux dirigeants de se jauger sur le conflit israélo-palestinien et l'Iran.

Le chef du gouvernement israélien participera à partir de 7H45 GMT, au côté du chef de l'Etat, à une cérémonie marquant le 75e anniversaire de l'un des épisodes les plus noirs de l'histoire française. C'est la première fois qu'un Premier ministre israélien participe à cette cérémonie.

Les 16 et 17 juillet 1942, 13 152 juifs avaient été arrêtés à la demande des nazis et sur ordre du pouvoir français en place. Retenus dans des conditions inhumaines pendant quatre jours, ils furent entassés sur les gradins du Vélodrome d'hiver (démoli en 1959), voué aux courses cyclistes, avant d'être emmenés dans des camps du Loiret. Là, 3000 enfants en bas âge furent brutalement séparés de leurs parents, déportés les premiers vers Auschwitz.

Moins d'une centaine de ces raflés - et aucun enfant - survécurent.

Cet épisode tragique a fait polémique pendant la dernière campagne présidentielle, Marine Le Pen ayant été vivement critiquée pour avoir affirmé que la France n'était «pas responsable du Vel d'Hiv». Jacques Chirac avait lui reconnu la responsabilité française en juillet 1995, une position depuis reprise par ses successeurs.

La venue du chef du gouvernement israélien a été critiquée par certaines associations, comme l'UJFP (Union juive française pour la paix), «choquée» qu'un dirigeant israélien soit convié à la commémoration d'un «crime contre l'humanité franco-français». Le Parti communiste a quant à lui vivement protesté contre la venue du dirigeant israélien, qui n'est «pas l'homme» du message «fort de paix» que devrait porter la commémoration du Vel d'Hiv.

Cette visite intervient dans un contexte particulier pour M. Nétanyahou, qui revient pour la première fois à Paris depuis la marche du 11 janvier 2015 après les attentats de Charlie Hebdo et de l'Hyper Casher.

Il effectue ce voyage quelques jours après un regain de tensions à Jérusalem: une attaque anti-israélienne a conduit à la fermeture de l'Esplanade des Mosquées.

M. Néthanyahou doit également composer avec une affaire de corruption présumée liée à l'achat de sous-marins allemands, qui impliquerait certains de ses proches.

«Préoccupation»

Pour conclure la cérémonie dimanche, les deux dirigeants prendront tour à tour la parole. Ils se rendront ensuite au palais présidentiel pour un entretien qui abordera notamment la Syrie, l'Iran et le conflit israélo-palestinien.

Dans une note destinée à la presse, l'Elysée estime samedi que cette rencontre entre les deux dirigeants, qui s'étaient déjà entretenu de façon informelle en marge d'un hommage à l'ancien chancelier allemand Helmut Kohl le 1er juillet à Strasbourg, permettra de «réaffirmer» la «volonté de sécurité» de la France et de signifier sa «préoccupation» devant la «remise en cause de la solution des deux Etats», israélien et palestinien.

Emmanuel Macron, qui a reçu récemment à l'Elysée le président palestinien Mahmoud Abbas, avait réitéré son soutien à cette solution et condamné la colonisation israélienne.

Il n'a en revanche pas fait savoir s'il entendait reprendre à son compte l'initiative de son prédécesseur François Hollande, qui prônait une approche internationale du conflit et avait organisé en janvier une conférence internationale sur le Proche-orient, provoquant l'ire d'Israël.

Les négociations entre Israéliens et Palestiniens n'ont jamais repris depuis l'échec d'une médiation américaine au printemps 2014, et la menace d'un embrasement du conflit pèse en permanence.

«Nétanyahou est un redoutable animal politique et veut s'assurer que la France n'interviendra pas davantage», analyse Jean-Paul Chagnollaud, spécialiste de la question palestinienne, qui rappelle que Nicolas Sarkozy, puis François Hollande, «ont espéré avoir de bons rapports avec M. Nétanyahou et ont déchanté assez vite».

Autre point sensible, l'Iran, bête noire d'Israël dans la région, qui a effectué en juin son premier tir de missiles en territoire étranger contre des cibles du groupe État islamique en Syrie.

Selon l'Elysée, la rencontre sera l'occasion de «signifier notre absence de complaisance envers l'Iran, en particulier concernant la position iranienne sur Israël».

Les deux dirigeants doivent faire une déclaration de presse conjointe, prévue en fin de matinée.