Des drapeaux, de la musique folklorique et un slogan, «le printemps des peuples»: les députés européens d'extrême droite ont fait leur campagne du «Brexit» en se retrouvant à Vienne quelques jours avant le référendum britannique.

Tous les eurosceptiques à travers l'UE espèrent une victoire du «leave» pour enclencher un effet domino au sein des États membres et affaiblir l'actuel modèle européen.

À boulets rouges contre l'UE



Le clan des plus bravaches se déclare prêt à tenter l'aventure d'une sortie de l'UE. Le député néerlandais Geert Wilders, dont le parti d'extrême droite PVV fait la course en tête dans les sondages, a placé la rupture avec une Union européenne «totalitaire» au rang de ses priorités en cas d'élection.

Même pas peur, semble dire aussi le dirigeant de la Ligue du Nord italienne Matteo Salvini, selon lequel «si l'Europe c'est ça, mieux vaut être seul qu'en mauvaise compagnie». L'Italie se paie le luxe de deux partis eurosceptiques avec le Mouvement cinq Étoiles qui a remporté de nouveaux succès aux élections municipales ce week-end.

«La France a peut-être mille fois plus de raisons de vouloir sortir de l'UE que les Anglais», a de son côté lancé la patronne du Front National, Marine Le Pen, à Vienne vendredi.

Une sortie du Royaume-Uni «prouvera qu'il est possible de vivre hors de l'UE», a récemment vanté celle que les sondages donnent régulièrement en tête du premier tour de la présidentielle française en 2017.

Mais plutôt qu'un «Frexit» unilatéral, c'est une «sortie concertée» de l'UE, dans le cadre d'un référendum, que semble viser la dirigeante du Front National.

Les appels à ce type de consultation populaire pourraient se multiplier en cas de Brexit et trouver un écho dans les pays nordiques également touchés par la vague populiste.

«Les petits pays, comme le Danemark et potentiellement la Suède (...) font partie du groupe 'à risque'» en cas de Brexit, note le politologue Carsten Nickels du groupe d'analyse Bruxellois Teneo.

Contributeurs nets du budget de l'UE, les pays scandinaves craignent que les crises européennes à répétition finissent par affecter leur prospérité.

Rester dans l'UE ... pour la changer

L'alternative à une brutale sortie de l'Union pourrait passer par une renégociation de certains traités afin de rendre aux gouvernements nationaux «la souveraineté» chère aux pourfendeurs de Bruxelles.

Le parti populiste allemand AfD dit ainsi craindre «la catastrophe» économique d'un Brexit mais y voit l'opportunité de réformer l'UE.

Le chef du FPÖ autrichien, Heinz-Christian Strache, qui vise la chancellerie en 2018, ne dit pas autre chose lorsqu'il affirme «aimer l'Europe» mais vouloir lui «imposer un changement de l'intérieur» au profit d'une formule «à la carte».

Le chef du gouvernement hongrois Viktor Orban a lui aussi déclaré sa flamme à l'Europe lundi, dans une supplique aux Britanniques à voter pour le maintien dans l'Union.

L'appel, diffusé dans la presse britannique, pourrait surprendre de la part d'un dirigeant en opposition régulière avec Bruxelles. La démarche est cependant réaliste et stratégique.

La Hongrie, comme la Pologne, et d'autres pays d'Europe centrale où l'eurosceptisme a le vent en poupe, bénéficie des aides financière européennes ; «ils n'auraient aucun avenir économique et politique en dehors de l'UE et ils le savent», observe Werber Fasslabend, de l'Institut autrichien pour les politiques européennes et de sécurité.

Viktor Orban s'efforce donc d'incarner au sein de l'UE une alternative aux politiques de «Bruxelles», notamment sur la question migratoire.

Même le Jobbik hongrois, l'une des extrêmes droites européennes les plus radicales, a récemment annoncé ne plus vouloir sortir de l'UE pour mieux la «transformer» de l'intérieur .

Et le gagnant est...

Les rhétoriques incendiaires contre l'UE sont une chose, la politique mise en oeuvre une fois au pouvoir en est une autre, souligne la politologue finlandaise Emilia Palonen en prenant l'exemple du parti d'extrême droite «Les Vrais Finlandais», dont le leader devenu ministre des Affaires étrangères, a mis en sourdine ses appels à sortir de l'UE.

À l'autre bout du spectre, composite, de l'eurosceptisme, la gauche grecque Syriza en a également rabattu sur ses promesses d'en découdre avec Bruxelles.

D'autant qu'en cas de Brexit, aucun cadeau ne sera fait aux Britanniques, ont prévenu les responsables européens. Un message également destiné à décourager les gouvernements tentés par l'aventure en solo.

Une UE affaiblie ne ferait qu'un vrai gagnant, observent les analystes: le président russe Vladimir Poutine qui «en profitera pour regagner de l'influence» en Europe de l'est, selon Werber Fasslabend, et pour dénigrer une Union en décomposition face au «modèle russe».