La dirigeante du Front national français Marine Le Pen, qui devait arriver vendredi au Québec pour une visite d'une semaine, peinera à se trouver un interlocuteur politique local.

Tous les partis contactés vendredi, tant au niveau provincial que fédéral, ont indiqué qu'ils n'avaient pas prévu de rencontre avec la politicienne de 47 ans.

La plupart ont ajouté n'avoir « aucun intérêt » pour une telle rencontre, témoignant du malaise suscité par les positions radicales de la formation d'extrême droite, notamment sur les questions d'immigration.

La Coalition avenir Québec (CAQ) de François Legault est le seul parti qui dit avoir été contacté par les organisateurs de Mme Le Pen avant sa venue.

L'attachée de presse à l'aile parlementaire du parti, Émilie Toussaint, s'est dite incapable vendredi de préciser pourquoi le Front national avait approché la CAQ.

Un élu français accompagnant Mme Le Pen, Sébastien Chénu, a affirmé en début de journée vendredi à Radio-Canada que des rencontres sont prévues avec des politiciens fédéraux, sans donner leur nom.

M. Chénu, qui n'a pas retourné les appels de La Presse, a précisé par ailleurs qu'un programme de rencontres avec des élus québécois était « en construction », là encore sans apporter de précision.

Jean-Yves Camus, un spécialiste français de l'extrême droite joint en France, s'est dit perplexe vendredi quant aux visées de la politicienne française, qui a prévu quelques rencontres avec la presse au cours des prochains jours.

« Je me demande qui elle a intérêt à rencontrer. Et qui au Québec a intérêt à la rencontrer. Pour les politiciens, ça ne peut rapporter rien d'autre que des ennuis »

-Jean-Yves Camus, spécialiste de l'extrême droite

Lors du dernier scrutin fédéral, le Bloc québécois s'est retrouvé dans l'embarras après que l'un de ses candidats, Jacques Tremblay, eut salué Marine Le Pen sur sa page Facebook.

Il s'était ensuite retiré de la course en précisant n'avoir jamais voulu cautionner la formation d'extrême droite française ou sa dirigeante.

Vendredi, l'attachée de presse du caucus du Bloc québécois, Julie Groleau, a rappelé que M. Tremblay s'était excusé pour son « petit dérapage ». Il travaille aujourd'hui à temps partiel au bureau du député de Montcalm.

Le Parti québécois a aussi été brièvement embarrassé l'année dernière après qu'il eut été révélé que de jeunes militants du Saguenay avaient envisagé de signer une lettre conjointement avec des membres du parti français. L'idée avait été rapidement dénoncée à l'interne.

Les prises de position du Front national sur des thèmes comme le multiculturalisme, la place de l'islam ou la laïcité recoupent certains débats ayant cours au Québec. Mais il n'existe pas dans la province, selon Jean-Yves Camus, de terreau fertile pour l'idéologie d'extrême droite du Front national hors de quelques « groupuscules » marginaux.

Des sympathisants de PEGIDA-Québec, une organisation qui fustige l'immigration, ont décrié vendredi sur Facebook le fait que les principaux partis provinciaux et fédéraux ne veulent pas rencontrer Marine Le Pen.

La plupart taxaient les élus d'« hypocrites » en leur reprochant de ne pas vouloir entendre parler des risques supposément soulevés par l'immigration.

Même son de cloche sur le site du Front national du Québec, qui a été créé récemment par Ugo Ménard, un microbiologiste de profession.

Une porte-parole du Directeur général des élections a indiqué vendredi qu'aucun parti de ce nom n'avait été formellement reconnu à ce jour.

En entrevue, M. Ménard a précisé que son organisation n'avait pas de lien officiel avec le Front national de Marine Le Pen mais qu'il aimerait bien que ce soit le cas. « Je cherche à la joindre, je veux avoir un rendez-vous avec elle », a-t-il précisé.

Selon lui, la population de « souche » du Québec est menacée de « génocide culturel » et doit lutter contre l'immigration pour se protéger.

« Travaille dans le sens de ton ethnie, ne soit pas un collaborateur », a-t-il déclaré en guise de conclusion.