Année des mises en scène macabres, relayées par l'internet sur les écrans du monde entier, 2014 a été marquée par une mutation de la violence contre les journalistes dans le monde, note Reporters sans frontières (RSF) dans son rapport annuel. Le nombre de journalistes tués dans l'exercice de leurs fonctions a légèrement diminué, mais le nombre d'enlèvements a bondi. Voici cinq conclusions du rapport publié hier.

119 enlèvements

Le nombre de journalistes enlevés dans le monde a augmenté de 37% en 2014, passant de 87 à 119. Du lot, 40 restent détenus à ce jour. Partout, ce sont les journalistes locaux qui «payent le plus lourd tribut»: ils représentent 90% des kidnappés. L'Ukraine compte à elle seule 33 journalistes enlevés. La Libye en compte 29, la Syrie, 27 et l'Irak, 20, ce qui place le Moyen-Orient au sommet du classement. RSF explique cette tendance «notamment par l'offensive du groupe État islamique dans la région ainsi que par l'insécurité qui règne en Libye».

66 meurtres

Comme en 2013, le «pays le plus meurtrier pour les journalistes» est la Syrie, avec 15 des 66 personnes tuées cette année. Ce sont dans les zones de conflit que les assassinats sont les plus fréquents, rapporte RSF, qui ajoute que «rarement la mort des reporters aura été perpétrée avec une science aussi barbare de la propagande». Le nombre total de journalistes tués dans le monde a baissé de 7% par rapport à 2013, ce qui s'explique notamment par la diminution des assassinats dans les pays «en paix» comme le Mexique, l'Inde et les Philippines.



178 emprisonnements

En date du 8 décembre, 178 journalistes croupissaient derrière des barreaux dans le monde en raison de leurs activités professionnelles. C'est la Chine et l'Érythrée qui sont les plus grandes prisons du monde. L'Égypte fait son entrée au palmarès, en quatrième place, en raison «du régime autoritaire du président Al-Sissi», affirme le rapport. RSF note que les «citoyens-journalistes» sont davantage emprisonnés au Viêtnam, où la presse indépendante est «pratiquement inexistante», et en Arabie saoudite, «où la loi sur la cybercriminalité s'abat sur toute voix dissidente».

1846 agressions

L'Ukraine compte cette année 215 journalistes agressés, un nombre «inégalé» qui s'explique «essentiellement par les violences policières ciblées à l'encontre des journalistes qui couvraient les événements de la place Maïdan en janvier et février derniers». Au Venezuela, RSF calcule que «62% des exactions commises contre des journalistes» l'ont été par la garde nationale bolivarienne. La situation est semblable en Turquie, où les journalistes subissent «l'usage disproportionné de la force par la police en marge des manifestations».

5 zones dangereuses

Outre les zones de conflits largement évoquées dans son rapport, RSF braque les projecteurs sur deux endroits moins connus qui sont dangereux pour les médias. Dans la province pakistanaise du Baloutchistan, les reporters sont «pris en étau» entre les groupes armés séparatistes et les forces de sécurité, que l'organisation qualifie tous deux de «prédateurs de la liberté de presse». En Colombie, écrire sur la corruption et le crime organisé s'avère très périlleux dans le département d'Antioquia, dans le nord-ouest du pays, où des bandes criminelles paramilitaires «sèment la terreur avec la complicité ou non des autorités locales».

LES VIOLENCES CONTRE LES JOURNALISTES EN 2014

> Ukraine : 6 tués/33 enlevés

> Territoires palestiniens :

7 morts

> Syrie : 15 tués/27 enlevés/

13 emprisonnés

> Irak : 4 tués/20 enlevés

> Libye : 4 tués/29 enlevés

> Iran : 19 emprisonnés

> Égypte : 16 emprisonnés

> Érythrée : 28 emprisonnés

> Chine : 29 emprisonnés

> Reste du monde : 30 tués/

10 enlevés/73 emprisonnés

> Tués : 66

> Enlevés : 119

> Emprisonnés : 178