Devant l'absence de consensus quant au choix du prochain président de l'Organisation internationale de la Francophonie, à quelques heures du début du 15e sommet, le Québec se montre tout à coup plus circonspect quant aux chances de la candidate canadienne Michaelle Jean.

«On est confiants», martelait jeudi la ministre des Relations internationales, Christine Saint-Pierre à l'issue d'une table ronde sur l'égalité des femmes dans la francophonie. Femme et plus jeune que ses adversaires dans la course à la succession d'Abdou Diouf, Mme Jean «pourrait donner un nouveau visage à la francophonie», souligne-t-elle.

Mais la quasi-certitude affichée au cours des dernières semaines sur l'élection de l'ex-gouverneur général du Canada n'était plus au rendez-vous.

Le Canada, le Québec et le Nouveau-Brunswick appuient Mme Jean, ainsi qu'Haïti, son pays d'origine. Mais jusqu'ici, chez les 45 pays où gouvernement représentés au sommet, aucun autre membre ne s'est publiquement rallié à la candidature canadienne. Les fonctionnaires du Québec soutiennent que sa tournée en Asie lui aurait rendu favorables les appuis du Vietnam, du Laos et du Cambodge. Le gouvernement canadien fait sa promotion avec insistance, défrayant même sa campagne internationale.

«On ne prend rien pour acquis, la cote de Mme Jean est excellente, mais on a un travail à faire, c'est pas fini, il y a d'autres candidats sur le terrain qui parlent aussi aux délégations», observe Mme Saint-Pierre. Chez ces adversaires, on retrouve le Congolais Henri Lopez, ambassadeur de son pays à Paris depuis 12 ans. S'estimant suffisamment connu en francophonie, cet écrivain de 77 ans n'a pas fait campagne toutefois. Il s'était désisté il y a 12 ans pour permettre au sénégalais Abdou Diouf de devenir le président de l'OIF sans opposition. Jean-Claude de L'Estrac, de l'Ile Maurice a mené une campagne active et décroché certains appuis régionaux, celui de Madagascar surtout, où se tiendra le prochain sommet, dans deux ans.

La France est restée silencieuse devant les campagnes des divers candidats. Or, contributrice à 46 % du financement de l'OIF qui totalise 100 millions par année, elle joue un rôle déterminant pour le choix qui se fera, à partir des échanges entre les chefs de gouvernement, samedi. La France a dit qu'elle appuierait un consensus africain, «quel qu'il soit».

«On ne fait pas campagne contre les autres, on est tous dans le même bateau de la francophonie. Elle est une femme du Nord, mais aussi du Sud puisqu'elle est d'Haïti», souligne Mme Saint-Pierre, relevant le charisme et l'ouverture aux pays émergents de l'ex-gouverneur général du Canada.

Jeudi, Mme Saint Pierre a souligné que le Québec s'employait à «faire comprendre que sa nomination serait un plus pour la francophonie, mais il faut y aller avec doigté, avec diplomatie».

Le sommet, qui réunit 45 membres - chefs d'États ou de gouvernements - amène plus de 3000 personnes dans la capitale sénégalaise. Quelque 600 journalistes viennent couvrir l'événement. Dakar avait déjà tenu un sommet, en 1989 - le choix de la capitale sénégalaise visait à souligner la contribution d'Abdou Diouf, l'ex-président, qui quitte la barre de l'OIF cette année.

Le premier ministre Philippe Couillard arrive jeudi soir à Dakar pour le sommet qui se déroulera formellement samedi et dimanche. Une délégation d'une vingtaine d'entreprises québécoises sera au rendez-vous, Bombardier, notamment, qui souhaite louer des avions au transporteur national sénégalais. Un tel marché permet aussi de contribuer à la formation des techniciens.