De Madrid à Athènes, l'Europe, frappée par le chômage, a manifesté mercredi, jour de la fête du Travail, contre les politiques d'austérité et pour davantage de mesures en faveur de l'emploi, lors de défilés qui ont peu mobilisé au regard de l'ampleur de la crise.

En Grèce, comme en Espagne, les deux pays du sud du continent où le chômage bat tous les records, à plus de 27 % de la population active, plusieurs milliers de personnes ont défilé à l'appel des syndicats.

«6 200 000 chômeurs, non à l'austérité!», «Plus de démocratie, moins d'austérité!», clamaient de petites pancartes dans le cortège qui a traversé Madrid.

«J'ai de la chance parce que j'ai du travail. Mais à la vitesse à laquelle on détruit des emplois en Espagne, je crois que bientôt cela m'arrivera à moi aussi», témoignait José Antonio Sebastian, un ingénieur de 50 ans. «Nous n'avons plus d'autre choix que de partir chercher du travail à l'étranger».

Au total, 82 manifestations étaient organisées à travers l'Espagne par les syndicats UGT et Comisiones obreras (CCOO), qui ont appelé le gouvernement à mettre en place un «pacte national» pour l'emploi alors que le chômage atteint le record historique de 27,16 %, et de 57,22 % chez les 16-24 ans.

Lors d'une rencontre à Paris avec le nouveau premier ministre italien de centre gauche, Enrico Letta, le président français François Hollande a d'ailleurs proposé d'accélérer le programme européen de lutte contre le chômage des jeunes, qui prévoit de débloquer 6 milliards d'euros (près de 8 milliards de dollars) entre 2014 et 2020. Et même le pape François a appelé, depuis Rome, les dirigeants politiques à faire leur possible pour créer des emplois.

«L'insécurité prévaut chez les jeunes. Il n'y a aucune incitation à poursuivre ses études», témoignait, à Athènes, un étudiant grec de 21 ans, Yiorgos Tavoularis.

Quelque 13 000 personnes, selon la police, ont manifesté à Athènes et à Thessalonique alors que la Grèce, soumise à des coupes draconiennes dans les salaires et les retraites, connaît sa sixième année consécutive de récession.

Les ferries grecs sont restés à quai, les liaisons avec les îles ayant été coupées en raison d'un arrêt de travail des syndicats de marins, traditionnellement en grève le jour de la fête du Travail.

Quelques heures plus tôt, des incidents avaient éclaté à Istanbul entre policiers et manifestants, en colère parce qu'ils ne pouvaient s'approcher de la place Taksim, un lieu emblématique de la grande ville turque, fermée pour des travaux.

L'Asie avait donné mercredi matin le coup d'envoi des défilés, placés aussi sous le signe des oubliés de la croissance, comme au Bangladesh où les ouvriers du textile travaillent dans des conditions très précaires pour les firmes occidentales.

Des dizaines de milliers de manifestants, criant «Pendez les tueurs! Pendez les propriétaires d'ateliers!», y ont réclamé justice après la mort, il y a une semaine, de plus de 400 ouvriers dans l'effondrement d'un immeuble abritant des ateliers de confection.

Dans les capitales européennes, les manifestants se sont réunis, en rangs relativement clairsemés, autour de slogans dénonçant l'austérité et le chômage. Car la hausse du chômage a atteint un nouveau sommet dans la zone euro, à 12,1 % de la population active en mars, et alimente un rejet croissant des politiques d'austérité, en particulier dans les pays du sud les plus douloureusement frappés.

En Italie centrale, des milliers de manifestants se sont rassemblés dans la ville médiévale de Pérouse, située dans l'une des régions où le chômage a le plus fortement augmenté.

En Pologne, ils étaient aussi quelques milliers à manifester, de même que dans les rues de Lisbonne, où la foule criait «Troïka dehors!», «FMI go home!»

Les manifestants protestaient contre les politiques d'austérité imposées à leur pays depuis deux ans par la «troïka» représentant les créanciers du Portugal (Union européenne, Fonds monétaire international et Banque centrale européenne).

En France, dans un climat social pesant où l'impatience grandit face à l'explosion du chômage, les syndicats, partagés sur la réforme du marché du travail, ont célébré le 1er mai en ordre dispersé, avec à la clé une mobilisation plutôt modeste et environ 100 000 manifestants dans l'ensemble du pays.