Les négociations à l'ONU sur un traité réglementant le commerce des armes ont été bloquées lundi avant même d'avoir commencé par une controverse sur la participation palestinienne, selon des diplomates.

Des pays arabes ont en effet demandé à ce que l'Union européenne soit exclue des discussions au siège de l'ONU si les Palestiniens ne pouvaient pas y participer.

«Les Égyptiens, au nom du groupe arabe, ont bloqué la conférence, ils insistaient pour que les Palestiniens y participent», a indiqué un diplomate arabe.

Le groupe arabe avait fait cette demande la semaine dernière et Israël avait alors menacé de boycotter la conférence si les Palestiniens étaient ainsi admis comme le serait un État souverain, selon des diplomates.

En réponse, «l'Égypte a dit que si les Palestiniens n'avaient pas un siège à la conférence, alors l'UE ne devrait pas être autorisée à siéger», a ajouté le diplomate arabe.

Les Palestiniens ont un statut d'observateur à l'ONU mais l'UE, également observatrice, jouit de droits plus étendus. Le Vatican, lui aussi observateur, a même réclamé de pouvoir siéger si les Palestiniens étaient admis à la réunion.

On ignorait lundi soir quand la conférence pourrait débuter.

«Ce début chaotique est une tragédie pour cette conférence si importante», a estimé un ministre occidental qui devait participer aux discussions.

Les 193 pays membres de l'ONU sont censés négocier jusqu'au 27 juillet un traité réglementant pour la première fois le commerce des armes conventionnelles, un marché de 70 milliards de dollars.

Ce futur traité international sur le commerce des armes classiques (TCA) doit empêcher les transferts d'armes qui pourraient être utilisées contre les populations civiles ou alimenter un conflit, en se fondant sur des critères précis.

Des diplomates soupçonnent que l'initiative de l'Égypte, gros acheteur d'équipements militaires américains (1,3 milliard de dollars par an), soit surtout une tentative pour affaiblir le traité.

«Certains pays ne veulent pas d'un traité avec des critères stricts de respect des droits de l'homme et exploitent la cause palestinienne en retardant» les travaux, a expliqué un diplomate occidental. «Ce n'est pas la question de la Palestine, c'est une bataille de procédure car ils savent qu'ils ne peuvent pas l'emporter sur le fond».

Les Palestiniens ont tenté en vain en septembre dernier de se voir reconnaître comme État membre de l'ONU mais ont obtenu en octobre leur admission à l'UNESCO.

Peu avant le début prévu de la conférence, le ministre finlandais des Affaires étrangères Erkki Tuomioja avait fait valoir «un sentiment d'urgence» à propos du TCA. «Nous assistons dans de nombreuses régions du monde à des conflits où des armes légères initialement transférées légalement tombent entre les mains de criminels, de groupes terroristes ou d'autres acteurs qui les utilisent aveuglément», avait-il souligné.

Mais même avant la controverse palestinienne, les négociations s'annonçaient difficiles. Il n'y a en effet pour l'instant aucun accord formel sur l'objectif prioritaire -- lutte contre le trafic d'armes ou moralisation des ventes légales -- ni sur la portée du traité ou sur les critères à respecter pour accepter ou refuser une vente.

Les Européens militent pour un traité large et juridiquement contraignant mais la Russie, qui a vendu pour 13,2 milliards de dollars d'équipements militaires en 2011, souhaite des critères peu contraignants, de même que l'Iran ou des pays arabes gros importateurs. Les États-Unis veulent exclure du traité les munitions, et la Chine les armes légères. L'Inde, plus gros importateur mondial d'armes, le Pakistan, le Japon ou l'Arabie saoudite font valoir le droit pour un pays d'équiper ses forces de sécurité.