Les marchands d'armes n'ont pas bonne presse. Beaucoup souhaiteraient que le commerce international des armes soit restreint, voire interdit. Mais cela n'empêcherait pas les ventes d'armes non réglementées par les pays n'adhérant pas aux conventions internationales. Et dans certaines régions, l'industrie militaire est un employeur important.

Dans les années 90, au début du règne travailliste au Royaume-Uni, le gouvernement a envisagé d'abandonner la promotion des armes britanniques à l'étranger. Certains économistes ont souligné que les subventions à l'exportation dépassaient les 20 000$CAN par emploi et ne contribuaient qu'à 1,2% du PNB du pays.

Et pourtant, les foires commerciales et les délégations mixtes BAE-politiciens n'ont pas cessé (BAE est le deuxième exportateur mondial d'armes).

«Pour les fabricants, les ventes internationales représentent le cinquième du chiffre d'affaires, mais le tiers des profits», explique Bill Keller, directeur du Centre pour le commerce et la sécurité internationale à l'Université de Géorgie. «Les gouvernements veulent conserver leurs champions nationaux pour des raisons stratégiques. Alors les ventes internationales continuent.»

D'autres chercheurs, comme Ron Smith, économiste au collège Birkbeck de Londres, soulignent que la concurrence permet d'abaisser les coûts. «Je suis sûr que les États-Unis auraient payé leur ravitailleur en vol plus cher si Airbus n'avait pas concurrencé Boeing», dit M. Smith.

Les ventes d'armes, qui frisent les 30 milliardsUS, sont de plus en plus transparentes, selon l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (SIPRI), dont la base de données remonte aux années 60. «Mais il reste des possibilités de corruption ou au moins de gaspillage», souligne M. Smith. «Les ventes d'armes font souvent partie d'ententes industrielles complexes.»

Les ventes d'armes légères sont toutefois moins transparentes, selon Matt Schroeder, analyste à la Fédération américaine des scientifiques, qui travaille avec le Small Arms Survey de l'Institut des hautes études internationales et du développement, à Genève. Par exemple, l'Italie et l'Allemagne, respectivement au 2e et au 3e rang mondial des exportations, ne déclarent pas leurs ventes d'armes antichars.

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UNE ZONE GRISE LÉGALE

La vente de matériel de surveillance (drones, équipement de surveillance téléphonique ou informatique) constitue une zone grise, parce que ce matériel peut être utilisé pour la répression. Huawei, le géant chinois des télécoms, a dû restreindre ses activités en Iran l'automne dernier parce que ses logiciels de surveillance étaient utilisés par le gouvernement, au grand déplaisir de ses clients occidentaux. Huawei serait aussi en pourparlers avec la Biélorussie. La société française Amesys, de son côté, a décidé de vendre son entreprise de surveillance internet après l'utilisation de ses services par le gouvernement Kadhafi, en Libye. La vente d'un drone ontarien aux rebelles libyens, l'an dernier, avait aussi fait les manchettes, parce qu'on ne savait pas avec certitude si elle contrevenait à l'embargo sur les armes.

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LES ACHETEURS ET LES VENDEURS

Canada

Achats (24e rang): 612 M$US

Ventes (14e rang): 528 M$US

Inde

Achats (1er rang): 6433 M$US

Ventes: 12 M$US

Pakistan

Achats (2e rang): 4125 M$US

Ventes: ND

Australie

Achats (3e rang): 3134 M$US

Ventes (17e rang): 224 M$US

Corée du Sud

Achats (4e rang): 2742 M$US

Ventes (15e rang): 322 M$US

Arabie saoudite

Achats (5e rang): 2120 M$US

Ventes (27e rang): 59 M$US

Émirats arabes unis

Achats (6e rang): 2012 M$US

Ventes (30e rang): 41 M$US

Singapour

Achats (7e rang): 1866 M$US

Ventes (33e rang): 32 M$US

Chine

Achats (8e rang): 1830 M$US

Ventes (5e rang): 2691 M$US

États-Unis

Achats (9e rang): 1827 M$US

Ventes (1er rang): 18 095 M$US

Maroc

Achats (10e rang): 1620 M$US

Ventes: ND

Russie

Achats (au-delà du 50e rang): 31 M$US

Ventes (2e rang): 13 754 M$US

Allemagne

Achats (au-delà du 50e rang): 178 M$US

Ventes (3e rang): 3683 M$US

France

Achats (au-delà du 50e rang): 151 M$US

Ventes (4e rang): 3293 M$US

Royaume-Uni

Achats (18e rang): 1013 M$US

Ventes (6e rang): 2203 M$US

Italie

Achats (32e rang): 384 M$US

Ventes (7e rang): 1639 M$US

Suède

Achats (au-delà du 50e rang): 122 M$US

Ventes (8e rang): 1339 M$US

Espagne

Achats (27e rang): 552 M$US

Ventes (9e rang): 1207 M$US

Israël

Achats (au-delà du 50e rang): 119 M$US

Ventes (10e rang): 1060 M$US

LÉGENDE: Les dix premiers acheteurs et vendeurs d'armes conventionnelles (et le Canada) sur le marché international en 2010 et 2011

SOURCE: Sipri 2012