La saison des Nobel s'ouvre lundi par la médecine et pendant quelques jours, chercheurs, poètes, romanciers ou faiseurs de paix vont guetter la sonnerie du téléphone dans l'attente d'un appel de Scandinavie. Un coup de fil porteur d'une reconnaissance inégalée et de dix millions de couronnes suédoises, soit environ un million d'euros...

Goran Hansson sera le premier à décrocher son téléphone lundi pour féliciter le prix Nobel de médecine 2011. Membre de l'Académie royale des sciences de Suède, le secrétaire du comité Nobel pour la médecine dévoilera le nom du ou des vainqueurs juste après les avoir appelés. «Quelquefois, ils pensent que c'est une plaisanterie», a-t-il confié à l'Associated Press. «D'habitude, je m'entretiens quelques minutes avec eux», raconte-t-il. «Je leur parle un peu de la cérémonie et le reste, puis je leur conseille de se faire un café, de reprendre leur souffle et de se préparer un peu avant que les médias ne commencent à les appeler».

Parmi les lauréats putatifs pour le Nobel de médecine figurent deux scientifiques qui ont cherché des clés pour mieux comprendre l'obésité, l'Américain Jeffrey Friedman et le Canadien Douglas Coleman. Ils ont déjà remporté plusieurs distinctions, dont le prix Lasker l'an dernier, souvent considéré comme un avant-Nobel, pour leur découverte de la leptine, une hormone qui régule la satiété et le métabolisme.

Autre sérieux prétendant, le Japonais Shinya Yamanaka, qui a fait faire un bond à la médecine régénérative, en montrant qu'il était possible de fabriquer des cellules souches sans embryon, à partir de cellules de la peau. Il a remporté le Lasker en 2009 et partagé cette année le prix Wolf en Israël, dont un tiers des récipiendaires en chimie, physique et médecine ont aussi gagné le Nobel.

Ce chercheur de l'université de Kyoto et de l'Institut Gladstone des maladies cardiovasculaires à San Francisco pourrait partager le prix avec le pionnier britannique du clonage John Gurdon ou encore le Canadien James Till qui a contribué à démontrer l'existence des cellules souches et découvert les cellules souches sanguines, permettant de sauver la vie de milliers de patients atteints de leucémie.

Si le prix bouleverse souvent la vie de scientifiques qui ont oeuvré pendant des années dans l'ombre, les Nobel de la paix et de littérature demeurent ceux qui rencontrent le plus d'écho médiatique.

Cette année, beaucoup s'attendent à voir le Nobel de la paix, qui sera dévoilé vendredi, saluer le printemps arabe en récompensant l'un des visages des révoltes et révolutions en cours au Maghreb et au Moyen-Orient. D'autant que le jury cherche souvent à relier ce prix à l'actualité, voire à des événements encore en cours, comme en témoigne le prix en forme d'encouragement attribué au président Barack Obama en 2009 dans la première année de son mandat.

«Je suis convaincu que le comité va travailler dur pour trouver un candidat méritant lié au printemps arabe», assure Kristian Berg Harpviken, directeur de l'Institut de recherche sur la paix d'Oslo, une voix très écoutée dans le jeu des pronostics pour les Nobel. Il mise personnellement sur les blogueuses égyptienne Israa Abdel Fattah et tunisienne Lina Ben Mhenni et les activistes égyptiens Ahmed Maher et Wael Ghonim.

Pour le Nobel de littérature, remis traditionnellement un jeudi, mais dont la date n'est annoncée qu'à la dernière minute, les favoris restent le poète syrien Adonis, les Canadiennes Margaret Atwood et Alice Munroe, le Sud-Coréen Ko Un et les Américains Philip Roth, Joyce Carol Oates et Thomas Pynchon. Sachant que les très secrets comités Nobel ne révèlent les noms de ceux qui étaient nominés qu'au bout de cinquante ans...

Depuis 1901, les Nobel distinguent chaque année ceux qui ont fait avancer la recherche scientifique, en médecine, physique et chimie, mais aussi la littérature ou la paix. L'économie est la seule catégorie qui ne figurait pas dans le testament signé en 1895 par Alfred Nobel, riche industriel suédois et inventeur de la dynamite, qui a fondé les prix. Le Nobel d'économie a été créé en 1968 par la Banque centrale de Suède en hommage à Nobel.

Les noms des lauréats sont annoncés à Stockholm, à l'exception du Nobel de la paix, dévoilé à Oslo, conformément aux volontés d'Alfred Nobel. Les prix sont remis chaque année le 10 décembre, jour anniversaire de sa mort en 1896.