Le «berlusconisme» peut-il survivre à Berlusconi? C'est la question que se posent les commentateurs après deux défaites électorales successives du premier ministre italien.

«On a beaucoup insisté sur l'impact des scandales sexuels sur la baisse de popularité de Berlusconi», explique Manlio Graziano, historien turinois qui enseigne à la Sorbonne et qui vient de publier en anglais The Failure of Italian Nationhood. «Mais je crois plutôt qu'il est simplement victime d'une lassitude générale quant au manque de dynamisme social et économique. Le berlusconisme, qui est basé sur l'égoïsme et l'hédonisme, est plus fort que jamais en Italie, n'en déplaise à la gauche.»

La Ligue du Nord

Paradoxalement, la défaite aux référendums de la fin de semaine dernière a renforcé l'alliance entre Berlusconi et les autonomistes de la Ligue du Nord. «Berlusconi a plus besoin que jamais de la Ligue, et vice-versa», estime Franco Pavoncello, politologue à l'Université John Cabot à Rome. «Umberto Bossi, le chef de la Ligue, devra certainement faire des menaces dimanche prochain, au grand rassemblement de la Ligue. Mais il s'entendra probablement avec Berlusconi sur une réforme limitée, par exemple sur le déménagement de ministères à Milan.»

La gauche célèbre

La gauche a célébré ses deux victoires - les élections administratives de mai et les référendums - en annonçant la fin de la «télécratie» (en référence à l'empire médiatique de M. Berlusconi), du «leaderisme» populiste et de la «postpolitique» basée sur le qualunquismo (du mot qualunque, qui signifie «n'importe quoi») qui ont transformé le pays en «décor de carton-pâte».

Mais il est difficile de prévoir comment la gauche va prendre le pouvoir. «Pour un vote de protestation, tout va bien, mais quand il s'agit de s'entendre sur un seul candidat de gauche, ça ne fonctionne pas, dit M. Pavoncello. La gauche n'a pas de personnalité aussi forte que Berlusconi.»

Le premier ministre veut d'ailleurs profiter du rôle accru joué ces dernières années par le président de la République et n'a pas renoncé à son projet de réforme permettant l'élection du président au suffrage universel (en ce moment, il faut une majorité des deux tiers dans les deux chambres du Parlement). «Dans les moments de crise, le président joue un rôle beaucoup plus important que ce qui est prévu par la Constitution, dit M. Graziano. Depuis quelques années, le président Napolitano a plusieurs fois croisé le fer avec Berlusconi. Je ne crois pas que Berlusconi réussisse à devenir président. Mais il est certain que Berlusconi serait lui aussi un président fort.»

S'il réussit ce tour de force, le Cavaliere jouira de l'immunité judiciaire jusqu'en 2020. «Je ne connaîtrai pas le sort de Craxi», a-t-il déclaré lundi, en référence au premier ministre socialiste qui a dû fuir en Tunisie en 1994 pour échapper à une enquête pour corruption (il y est mort en 2000).

Giulio Tremonti ou Angelino Alfano? Lors d'un souper avec la presse étrangère en avril, Silvio Berlusconi a tour à tour évoqué ces deux candidats pour lui succéder comme premier ministre après les élections de 2013. Le premier est «superministre» de l'Économie, poste qu'il a occupé pendant un total de près de 10 ans depuis le premier gouvernement Berlusconi, en 1994. Le second est ministre de la Justice depuis 2008 et a notamment été responsable de plusieurs lois limitant la possibilité de poursuites contre le premier ministre. «Tremonti vient du Nord. Il est très respecté pour avoir évité le pire sur le plan budgétaire, et il est bien vu des catholiques, mais il n'a aucun charisme», estime Manlio Graziano de la Sorbonne. Quant à Alfano, il a comme principal avantage de pouvoir mobiliser le vote du Sud parce qu'il est sicilien d'origine.

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Les dauphins potentiels

Giulio Tremonti ou Angelino Alfano? Lors d'un souper avec la presse étrangère en avril, Silvio Berlusconi a tour à tour évoqué ces deux candidats pour lui succéder comme premier ministre après les élections de 2013. Le premier est «superministre» de l'Économie, poste qu'il a occupé pendant un total de près de 10 ans depuis le premier gouvernement Berlusconi, en 1994. Le second est ministre de la Justice depuis 2008 et a notamment été responsable de plusieurs lois limitant la possibilité de poursuites contre le premier ministre. «Tremonti vient du Nord. Il est très respecté pour avoir évité le pire sur le plan budgétaire, et il est bien vu des catholiques, mais il n'a aucun charisme», estime Manlio Graziano de la Sorbonne. Quant à Alfano, il a comme principal avantage de pouvoir mobiliser le vote du Sud parce qu'il est sicilien d'origine.