Washington a accru sa pression sur Damas mercredi en annonçant des sanctions contre le président Bachar al-Assad et en l'enjoignant d'entamer une transition politique «ou partir», alors que la répression de la contestation a fait de nouvelles victimes dans la ville assiégée de Tall Kalakh.

Huit civils ont été tués mercredi à Tall Kalakh, ont indiqué deux militants des droits de l'homme joints par téléphone. Ils ont fait état de bombardements sur cette ville de l'ouest de la Syrie assiégée depuis plusieurs jours et de tirs à l'arme automatique, ajoutant que de nombreux blessés gisaient dans la rue sans pouvoir être évacués.

Depuis le début du mouvement de contestation, le 15 mars, au moins 850 personnes sont mortes, selon des ONG et l'ONU, plus de 8000 ont été arrêtées et des milliers de civils ont fui le pays.

Face à la répression, les États-Unis ont finalement décidé de sanctionner le président syrien. Jusqu'à présent les mesures américaines ne concernaient que des dirigeants du régime.

Il s'agit «d'une mesure décisive pour accroître la pression sur le gouvernement syrien afin qu'il cesse la violence contre son peuple et entame la transition vers un système démocratique», affirme un communiqué de l'administration américaine.

«Assad doit diriger une transition politique ou partir», insiste le texte des départements d'État et du Trésor, tout en notant qu'un départ du président est une décision qui «revient au bout du compte au peuple syrien».

Également concernés par ces sanctions, six autres caciques du régime: le vice-président Farouk al-Chareh, le premier ministre Adel Safar, le ministre de l'Intérieur Mohammad Ibrahim al-Chaar, le ministre de la Défense Ali Habib, le chef des renseignements militaires Abdel Fatah Qudsiya, et le «directeur de la sécurité politique» Mohammed Dib Zaitoun.

Les mesures américaines, gel des biens des personnes visées, touchent également deux chefs des Gardiens de la Révolution iranienne, pour leur rôle dans la répression en Syrie, selon le communiqué de Washington.

L'administration Obama a expliqué être «très inquiète de l'implication d'entités iraniennes dans la violence récente en Syrie».

Ces annonces surviennent à la veille d'un discours attendu du président Barack Obama sur le Moyen-Orient.

Quelques heures avant que Washington ne fasse ces annonces, le président russe Dmitri Medvedev avait averti qu'il n'approuverait pas l'adoption d'une résolution à l'ONU autorisant le recours à la force en Syrie, arguant que la coalition occidentale ne respectait pas les décisions du Conseil de sécurité au sujet de la Libye.

Pour le président Assad pourtant, «la crise (a) été surmontée» et «les événements (sont) en passe d'être terminés», a-t-il assuré mardi devant une assemblée locale, selon des déclarations publiées par le journal Al-Watan.

Depuis le début des violences, les autorités attribuent les troubles à des «salafistes», des «gangs criminels» ou à «des groupes terroristes armés», dont certains liés à l'étranger.

Mais sur le terrain, les témoins parlent de massacres perpétrés par les forces de l'ordre et les milices locales, comme mercredi à Tall Kalakh. La veille, un habitant avait déjà qualifié mardi cette localité de «ville fantôme», parlant de «massacre».

Et la répression semble porter ses fruits: l'appel à la grève générale mercredi lancé par l'opposition a été peu suivi.

Dans plusieurs foyers de la contestation, l'intervention ou le siège par les forces de sécurité a de toutes les façons paralysé ou du moins ralenti les activités économiques et sociales, en particulier à Homs (centre), Deraa (sud), Banias (nord-ouest) et tout récemment à Tall Kalakh.

«Qui oserait observer la grève générale et risquer ainsi de perdre son commerce ou d'être visé par les autorités?», a fait valoir à Damas un homme d'affaires ayant requis l'anonymat. «Quiconque baisserait ses rideaux de fer serait immédiatement repéré et risquerait de perdre son gagne-pain!»

Dans la capitale, plutôt épargnée par les grandes manifestations contre le régime, les écoles et les commerces sont restés ouverts, et les transports publics fonctionnaient normalement.

La grève n'était pas non plus suivie à Alep, deuxième ville du pays, ont déclaré des habitants à l'AFP. De même à Lattaquié, principal port où un habitant a affirmé que «la majorité (des habitants) n'était même pas au courant» de l'appel à la grève.

Selon des vidéos diffusées sur YouTube, des dizaines de personnes ont manifesté dans un des souks de la ville de Homs, où les magasins étaient fermés.

Un autre film posté sur le même site montrait également des rideaux de fer tirés dans un souk de Zabadani, non loin de Damas.

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