La Turquie a menacé Israël lundi d'une rupture des relations si l'État hébreu ne s'excusait pas pour le raid de ses forces contre une flottille d'aide pour Gaza, et annoncé avoir fermé son espace aérien aux vols militaires israéliens.

Ce durcissement d'Ankara a été exprimé par le chef de la diplomatie, Ahmet Davutoglu, cité par la presse, et ce malgré une rencontre secrète la semaine dernière entre lui et un ministre israélien qui laissait présager un léger réchauffement entre les deux pays, liés par un partenariat stratégique. Jusqu'à présent, les Turcs n'avaient pas évoqué l'éventualité d'une rupture diplomatique même si les relations bilatérales, jadis qualifiées d'exemplaires, ont été sérieusement endommagées après le raid, le 31 mai, dans les eaux internationales, d'un convoi maritime humanitaire à destination de Gaza qui avait fait neuf morts turcs.

La Turquie a rappelé son ambassadeur et annulé des exercices militaires avec Israël.

M. Davutoglu, qui s'exprimait devant des journalistes dans l'avion le ramenant d'un voyage au Kirghizstan, a exhorté Israël à s'excuser ou à accepter les conclusions d'une commission d'enquête internationale.

Sinon, a-t-il averti, «les relations seront rompues».

Israël refuse de s'excuser

Israël «ne s'excusera jamais» auprès d'Ankara pour le raid, a toutefois affirmé lundi un haut responsable du bureau du premier ministre Benjamin Nétanyahou. Ce dernier avait déjà dit vendredi soir qu'Israël ne s'excuserait pas pour l'abordage du navire turc.

Contrairement à des déclarations précédentes, M. Davutoglu est apparu plus souple au sujet d'une commission créée par Israël pour enquêter sur l'affaire de la flottille.

«Si cette commission conclut que le raid était injuste et s'ils s'excusent, cela serait aussi suffisant», a-t-il souligné, insistant également sur le paiement de compensations.

La Turquie réclamait jusqu'à présent la création d'une commission d'enquête internationale et indépendante.

M. Davutoglu a aussi annoncé la fermeture totale de l'espace aérien turc aux vols militaires israéliens, une décision de rétorsion prise «pour isoler Israël» une semaine après son raid.

«Cette décision n'a pas été prise pour un ou deux avions seulement», a-t-il souligné, précisant qu'elle pourrait éventuellement être élargie aux vols civils.

Ankara avait confirmé la semaine dernière la fermeture du ciel turc à deux avions militaires d'Israël tout en assurant qu'il ne s'agissait pas d'une interdiction générale.

M. Davutoglu a souligné avoir présenté de nouveau les demandes turques lors d'un entretien secret qu'il a eu mercredi à Bruxelles avec le ministre israélien du Commerce et de l'Industrie, Binyamin Ben Eliezer, premier contact bilatéral depuis le raid.

«Nous n'attendrons pas jusqu'à l'éternité pour la réponse israélienne», a-t-il ajouté.

«La Turquie est décidée à protéger ses intérêts dans cette affaire, et pour cela elle insiste pour des excuses et des indemnisations», a souligné une source diplomatique à l'AFP sous couvert d'anonymat.

Cette source a qualifié d'«importante» pour la Turquie les conclusions de la rencontre que doit avoir M. Nétanyahou avec le président américain Barack Obama à la Maison-Blanche, mardi.

Washington a clairement indiqué la semaine dernière qu'un rétablissement des liens turco-israéliens était de son intérêt dans la région.

Seul membre musulman de l'OTAN, la Turquie a des frontières avec la Syrie, l'Irak et l'Iran, en qui Israël voit une menace nucléaire grandissante.