Les victimes de viol ont la vie particulièrement dure en Grande-Bretagne si elles veulent obtenir justice. Seulement 6% des viols signalés aux autorités aboutissent à un verdict de culpabilité. Cette statistique notoire ne devrait plus être utilisée parce qu'elle dissuade les victimes d'alerter la police, selon un rapport controversé publié hier.

Mary, 46 ans, n'a plus confiance en la police depuis qu'elle a été violée.

C'était en juin 2008. Dès ses premières démarches auprès des forces de l'ordre, elle ne se sent pas respectée. On ne la rappelle pas. Elle doit se battre pour amener son violeur en cour.

 

Au procès, la détective chargée de l'enquête la dépeint comme une «emmerdeuse». Mary a même du mal à voir son avocat. «C'était horrible. J'avais l'impression que c'était moi l'accusée», dit la Londonienne, qui préfère taire son nom de famille.

Son agresseur a finalement été acquitté, même s'il a admis devant le tribunal que Mary n'avait pas consenti au rapport sexuel.

Mary fait partie des 94% de victimes de viol dont l'agresseur n'ira jamais derrière les barreaux. Des groupes de femmes dénoncent régulièrement cette tache à la réputation de la justice britannique.

Un important rapport publié hier reconnaît le traitement «choquant» que subissent certaines victimes d'agression sexuelle. L'auteure, dame Vivien Stern, écrit que des plaignantes ont eu l'impression d'être violées une seconde fois dans les rouages de la justice.

Selon elle, la statistique selon laquelle seulement 6% des viols signalés à la police se terminent par un verdict de culpabilité ne devrait plus être utilisée parce qu'elle aurait un effet pervers: elle dissuaderait les personnes violées de porter plainte.

On ne devrait tenir compte que des cas de viol portés devant la justice, croit-elle. Dans les faits, 58% des accusés sont reconnus coupables. «C'est un meilleur résultat que dans les procès pour meurtre», note Mme Stern dans son rapport.

Cette recommandation a été très mal reçue non seulement par des groupes de femmes, mais aussi par l'adjointe du procureur général. «Le taux de 6% a une énorme signification. Il reflète le grand nombre de victimes qui jettent l'éponge avant d'aller en cour», a dit Vera Baird.

«Sans les nombreuses bourdes des policiers et la culture de blâme envers les victimes de viol, nous n'aurions pas à faire tant de bruit autour de ces 6%», explique de son côté Ruth Hall de l'organisme Women Against Rape.