Les organisateurs du sommet de Copenhague peuvent remercier Nicolas Sarkozy. En effet, si les États-Unis et la Chine ont annoncé des objectifs chiffrés de réduction des émissions polluantes à la veille de la rencontre internationale, c'est grâce à lui, ou du moins à l'accord sur le climat qu'il a signé à la mi-novembre avec son homologue brésilien Luiz Inácio Lula da Silva.

«Ç'a fait bouger Obama», s'est félicité le président français la semaine dernière au cours de sa tournée au Brésil et dans les Caraïbes. «Il a vu le piège et après, la Chine a bougé. Personne ne veut le mistigri de l'échec» au Danemark.

En revanche, Nicolas Sarkozy n'est vraiment pas content de la décision de son homologue américain de se rendre à Copenhague le 9 décembre, et non les 17 et 18 comme les autres chefs d'État et de gouvernement.

«Le moment décisif, c'est les 17 et 18 décembre, a-t-il martelé à Port of Spain. Si certains viennent au début, d'autres à la fin, à quel moment gérons-nous les décisions?»

«Il faut qu'ils (les chefs d'État et de gouvernement) soient là, ensemble, pour discuter, amender, négocier, trouver des solutions. Si on n'est pas là en même temps, quelles solutions pouvons-nous trouver?»

Décidément, il faut tout lui apprendre à ce Barack Obama, aurait pu ajouter Nicolas Sarkozy, qui a pris l'habitude d'exprimer tout haut son impatience, sa condescendance ou ses doutes à l'égard de celui qu'il qualifiait de «copain» en juillet 2008. Cette attitude participe d'une «fixation», selon l'hebdomadaire américain Newsweek, qui a publié en octobre un article sur «le complexe Obama de Sarkozy».

«Les relations entre les deux chefs d'État sont loin d'être au beau fixe, voire de fonctionner toujours de façon efficace», a écrit Christopher Dickey, correspondant de Newsweek à Paris. «On se demande même parfois si Obama remarque son homologue hypercinétique. Et cela explique la fixation sur Obama qui semble s'être emparée de l'ambitieux Parisien.»

Prenant le relais de Newsweek, l'hebdomadaire français L'Express publie dans son numéro courant un dossier sur «l'obsession Obama» de Nicolas Sarkozy, évoquant notamment l'irritation du Français face à «la magie irrationnelle entourant chacun des actes du premier président noir de l'histoire des États-Unis». («Il n'y a pas que la forme en politique, pas que le glamour, il y a les dossiers!» s'était-il exclamé à son retour du sommet du G20 à Londres.)

Quand on se compare...

Mais Sarko se console ces temps-ci en se comparant au président américain, qui se heurte à des difficultés multiples.

«Qu'est-ce qu'on aurait dit si j'avais perdu des élections comme ça? Vous rendez-vous compte, il (le chef d'État américain) est allé quatre fois, oui, quatre fois dans l'État du New Jersey», a-t-il lancé, selon L'Express, au lendemain de la défaite des démocrates lors d'élections pour des postes de gouverneur, le 3 novembre.

Un autre jour, il a déclaré: «Obama est au pouvoir depuis un an, il a perdu les trois élections. Depuis septembre, j'ai eu deux législatives partielles, nous les avons gagnées; il y a quatre mois, nous avions des élections européennes, nous sommes sortis vainqueurs.»

Iran et scepticisme

Nicolas Sarkozy s'ouvre ainsi devant des ministres, des dirigeants de la majorité et des journalistes. Ses déclarations n'ont guère d'impact outre-Atlantique, sauf peut-être chez les néo-conservateurs, qui ont notamment pris note du scepticisme du président français concernant la politique de la main tendue de Barack Obama à l'égard de l'Iran.

«La perception qu'Obama est faible a déjà commencé à poindre même en Europe, notamment chez le président français Nicolas Sarkozy», a écrit l'ex-ambassadeur des États-Unis à l'ONU, John Bolton, après la tournée récente du président américain en Asie.

La Maison-Blanche pourrait sans doute répondre que son approche a donné des résultats positifs dans le dossier du nucléaire iranien. La Chine et la Russie, sous forte pression des États-Unis, se sont ainsi ralliées vendredi à la résolution du conseil exécutif de l'AIEA condamnant l'Iran pour avoir caché l'existence d'un site nucléaire sensible, une première depuis 2006.

Et l'entourage du président américain a déjà fourni sa propre explication à la décision de la Chine d'annoncer des objectifs chiffrés de réduction des émissions de CO2. Une explication qui n'est pas liée à Nicolas Sarkozy, mais plutôt aux négociations qui se sont déroulées dans le cadre de la visite de Barack Obama en Chine.

Le temps viendra sans doute où un journaliste américain dévoilera ce que pense le président Obama de son homologue français. En attendant, le dernier mot revient à L'Express, selon lequel Nicolas Sarkozy a confié à un membre du gouvernement «son inquiétude de voir l'Américain être assassiné».

Un vrai «copain», quoi.