Trois retraités de la Guerre froide, Helmut Kohl, 79 ans, George Bush, 85 ans, et Mikhaïl Gorbatchev, 78 ans, ont mis sur le compte de leurs excellentes relations personnelles le succès de l'ouverture du Mur il y a 20 ans et de la Réunification allemande, samedi à Berlin.

Devant le rideau lamé argent d'une salle de spectacle, l'ancien chancelier allemand (1982-1998), l'ancien président américain (1989-1993), l'ex-numéro un soviétique (1985-1991) ont partagé leurs souvenirs de l'automne 1989, en prélude aux célébrations du 9 novembre.

«Mikhaïl Gorbatchev et George Bush ont été les partenaires les plus importants de l'Allemagne», a assuré M. Kohl, cloué dans un fauteuil roulant depuis une fracture de la hanche en février 2008.

«Il n'y a jamais eu de relation atteignant le niveau de ma relation avec ces deux gentlemen» (en anglais dans le texte).

Le «chancelier de la réunification» a dit n'avoir été «pas sûr de pouvoir participer à cette célébration» suite à un «sérieux accident cette année», manifestement un accident vasculaire cérébral qui lui a paralysé le bas du visage et rendu l'élocution difficile.

«Si vous étiez de mauvaise humeur, il suffisait de décrocher le téléphone et d'appeller George Bush (...) je peux vous assurer qu'il vous mettait de bonne humeur», a-t-il raconté, provoquant l'hilarité des quelque 1800 invités d'une fondation proche du parti conservateur CDU, parmi lesquels la chancelière fraîchement réélue Angela Merkel, les anciens Premiers ministres hongrois et polonais Miklos Nemeth et Tadeus Mazowiecki, ainsi que des dizaines d'ambassadeurs.

M. Bush était accompagné de son épouse Barbara et M. Gorbatchev de sa fille Irina Virganskaïa pour ces retrouvailles dans le Friedrichstadtpalast de l'ex-Berlin-est, surnommé du temps de la RDA «Les Folies bergères d'Honecker», en référence à l'ancien dirigeant communiste: ses revues emplumées étaient ce qu'on faisait de plus «parisien».

Saluant ses «anciens collègues», le président américain, qui se déplace difficilement depuis une opération de la hanche en 2007, a renvoyé les compliments à M. Kohl, «réellement un grand homme d'État du 20e siècle, (...) un roc, solide!"

«Néanmoins, les évènements de 1989 n'ont pas été initiés à Bonn, Moscou ou Washington, mais dans les coeurs et les esprits de gens privés depuis trop longtemps des droits que Dieu leur avait accordé», a-t-il lancé.

C'est à Mikhaïl Gorbatchev, le plus alerte, qu'il est revenu de mentionner les deux grands absents, dont les pays occupaient Berlin-Ouest avec les États-Unis: l'ancienne Premier ministre britannique Margaret Thatcher, 84 ans, atteinte de la maladie d'Alzheimer, et le président français François Mitterrand, décédé en 1996.

«Thatcher, Mitterrand et moi-même nous défendions la position qu'il fallait deux Allemagne», a-t-il reconnu. «J'en suis désolé, Helmut. Nous n'avions pas de bonne relation au début».

La France vient d'ouvrir ses archives diplomatiques sur l'époque, qui confirment l'hostilité britannique et une frilosité française face à la Réunification.

Les trois anciens dirigeants devaient être samedi soir les hôtes du groupe de presse Springer, éditeur notamment du quotidien populaire Bild et du journal conservateur Die Welt.

Pour l'anniversaire proprement dit, le 9 novembre, est organisée une «Fête de la liberté». Mme Merkel recevra notamment M. Gorbatchev et l'ancien leader anti-communiste polonais Lech Walesa, le Premier ministre britannique Gordon Brown, ou encore les présidents russe et français Dmitri Medvedev et Nicolas Sarkozy. Le président américain Barack Obama sera représenté par sa secrétaire d'État Hillary Clinton.