Qui est Franny Armstrong? La militante est devenue la championne de l'environnement en Grande-Bretagne. Son film The Age of Stupid, un docufiction coup de poing, sera présenté en première mondiale à New York le 21 septembre. Al Gore et Michael Moore n'ont qu'à bien se tenir.

«Nous avons une mission majeure, comparable à l'abolition de l'esclavage et à la conquête de l'espace.» C'est avec ces paroles que Franny Armstrong mesure le rôle de sa génération, qu'elle surnomme la «génération MTV».

 

Pour la réalisatrice de The Age of Stupid (L'ère stupide), l'homme est le premier être vivant à mener sa propre espèce à l'extinction en toute connaissance de cause. «Nous n'avons plus que quelques mois pour renverser la vapeur», dit la femme de 35 ans, en entrevue téléphonique.

Sans cette verve, le film, financé à même le grand public, n'aurait jamais vu le jour. Il sera pourtant présenté le 21 septembre prochain dans 45 pays en simultané à l'occasion de la première mondiale, écolo bien sûr, à New York. L'ancien secrétaire général de l'ONU Kofi Annan et le chanteur de Radiohead, Thom Yorke, y participeront.

Franny Armstrong n'aurait pu choisir meilleure date. Le lendemain de la première, les dirigeants du monde se réuniront au siège de l'ONU pour se préparer à la conférence de Copenhague. Ce sommet, tenu en décembre, décidera de l'après-Kyoto.

Style de vie suicidaire

Le docufiction, acclamé à sa sortie britannique en mars dernier, se déroule en 2055 sur une Terre post-apocalyptique. Le dernier survivant, interprété par Pete Postlethwaite (In the Name of the Father), regarde des archives datant de 2008 et se demande pourquoi les humains n'ont pas freiné le réchauffement climatique lorsqu'ils en avaient l'occasion.

«C'est comme voir des gens tourner en rond sur une plage, hypnotisés par les grains de sable sous leurs pieds, alors qu'un tsunami fonce vers eux», dit le personnage central.

Après The Inconvenient Truth d'Al Gore (Une vérité qui dérange en français), le monde avait-il besoin d'un autre documentaire sur les changements climatiques? C'est comme demander si un autre film sur la guerre était nécessaire, répond-elle.

«J'étais un peu nerveuse quand son film est sorti, admet-elle enfin. Mais nos approches sont très différentes. Son film aborde la question scientifique alors que le mien s'intéresse aux conséquences humaines de notre style de vie suicidaire.»

Un peu comme une Obama de l'environnement, Franny Armstrong a financé son documentaire grâce à une collecte de fonds populaire. Plus de 200 personnes et organisations ont acheté des parts, pour une enveloppe totale de quelque 800 000$CAN.

La pasionaria est tombée dans la soupe du militantisme quand elle était petite. Son père, le documentariste Peter Armstrong, parcourait le monde pour la BBC. Sa mère travaillait auprès des sans-abri de son quartier.

Ses deux films précédents, McLibel et Drowned Out, ont été vus par 55 millions de personnes. Sa notoriété pourrait bientôt rivaliser avec celles de Michael Moore et d'Al Gore aux États-Unis, où The Age of Stupid sera distribué dans 440 salles.

En Grande-Bretagne, elle n'a plus besoin de présentation. En mars dernier, elle a convaincu le ministre de l'Environnement, Ed Miliband, de faire marche arrière sur un projet de centrale au charbon.

Aussi, elle a lancé le 4 septembre la campagne 10:10, dont l'objectif est d'inciter la population à baisser ses émissions de CO2 de 10% en 2010. Il s'agirait du seuil critique pour éviter la catastrophe climatique. Déjà 20 000 personnes, écoles et entreprises britanniques ont promis de le faire.

Comment diable fait-elle? «Ces jours-ci, je me sens coupable si je passe cinq minutes sans militer, dit-elle. Je vais prendre une pause d'un an après la sortie du film.»

On n'y croit pas une seconde.

Au Québec, le film sera présenté à l'ONF le 6 octobre à l'occasion d'une soirée animée par le réalisateur Hugo Latulippe.