Les théoriciens de la conspiration ne mettent pas en doute la date de naissance de Barack Obama, qui pourra célébrer demain son 48e anniversaire l'esprit en paix. Mais l'endroit où le président américain a vu le jour soulève aux États-Unis une polémique dont l'ampleur menace de redéfinir le Parti républicain.

La controverse ne date pas d'hier. Durant la campagne présidentielle de 2008, des rumeurs ont circulé selon lesquelles le candidat démocrate est né au Kenya, la patrie de son père. Or, la Constitution des États-Unis stipule expressément que «nul ne pourra être élu président s'il n'est pas citoyen de naissance». L'équipe du sénateur de l'Illinois a tenté de combattre ces rumeurs en publiant sur l'internet le certificat de naissance de Barack Hussein Obama, qui dit qu'il est bel et bien né le 4 août 1961 à Honolulu, dans l'État d'Hawaii.

 

Peine perdue. Pas moins de 58% des républicains doutent que le président démocrate soit né aux États-Unis (28% d'entre eux refusent carrément d'y croire), selon un sondage de la maison Research 2000 diffusé vendredi. Les personnes âgées et les gens des États du Sud sont les plus susceptibles de sympathiser avec les birthers, nom donné aux promoteurs de cette théorie du complot selon laquelle les États-Unis sont représentés à la Maison-Blanche par un imposteur né en Afrique.

De là à taxer de racisme ou d'extrémisme les birthers, il y a un pas que n'ont pas hésité à franchir certains observateurs, dont Mark Potok, du Southern Poverty Law Center, un organisme qui étudie les regroupements extrémistes: «Ces gens sont fondamentalement soit racistes, soit d'extrême droite. Ils ne supportent pas de voir Barack Obama président largement parce qu'il est noir, mais aussi parce qu'il est progressiste.»

Orly Taitz est l'une des pionnières du mouvement des birthers. Originaire de la Moldavie¸ cette avocate de Californie multiplie depuis un an les actions en justice pour prouver l'inégibilité de Barack Obama, dont elle compare la politique à celles de Staline et Hitler. Elle a pu défendre sa théorie de la conspiration à l'émission radiophonique de l'animateur Lou Dobbs, qui a également traité du sujet à son émission télévisée sur CNN, une chaîne d'information sérieuse.

Plusieurs autres vedettes des médias, dont les animateurs radiophoniques Michael Reagan et Rush Limbaugh, ont aussi exprimé en ondes de la sympathie pour les birthers. «Barack Obama a une chose en commun avec Dieu. Vous savez ce que c'est? Dieu non plus n'a pas de certificat de naissance», a ironisé Limbaugh lors d'une émission diffusée en juin.

Les birthers peuvent également compter sur des alliés à la Chambre des représentants, où neuf élus républicains ont proposé un texte de loi qui exigerait que les candidats à la présidence produisent leur certificat de naissance. Certains de leurs collègues, qui semblent avoir peur de se mettre à dos les «conspirationnistes», emploient des formules évasives lorsqu'ils sont interrogés sur la citoyenneté du président démocrate. «Il y a des questions», dira l'un. «Je n'ai pas vu le document original», dira l'autre. «Je ne pourrais pas le jurer sur la Bible», dira un autre encore.

Ces élus entretiennent le doute malgré la conclusion catégorique à laquelle le groupement non partisan FactCheck.org, qui relève de l'Université de la Pennsylvanie, est arrivé après avoir examiné l'original de l'acte de naissance d'Obama: «Nous confirmons qu'il est absolument conforme à tout ce que requiert le département d'État pour prouver que l'on est citoyen américain. Notre conclusion: Obama est né aux États-Unis, comme il l'a toujours dit.»

FactCheck.org a également trouvé une annonce que la mère et le père d'Obama avaient fait paraître dans un journal d'Honolulu, le 13 août 1961, pour faire part de la naissance de leur fils.

Mais ces preuves irréfutables n'ont pas encore eu raison des birthers, dont l'influence risque de ternir l'image du Parti républicain, si l'on se fie au sondage Research 2000. Ce ne serait pas la première fois que les théoriciens du complot auraient une certaine emprise sur le Grand Old Party. Dans les années 50 et 60, les Birchers, membres de l'organisation d'extrême droite John Birch Society, voyaient des communistes partout, y compris dans le Bureau ovale, à l'époque du président républicain Dwight Eisenhower.

William Buckley, fondateur de la revue conservatrice National Review, avait tenu à dissocier le Parti républicain des Birchers en condamnant les «diffamations idiotes et paranoïaques» des membres de ce mouvement. Aucun républicain de sa stature ne s'est encore levé pour fournir pareil verdict sur les birthers.