La politique américaine ressemble souvent à un match de lutte professionnelle. Il y a des coups fourrés, du clinquant, des sauts du haut du troisième câble. Dans les deux cas, il y a beaucoup de bruit. Dans les deux cas, il y a souvent bien peu de substance.

La controverse entourant le discours de Barack Obama en Égypte, aujourd'hui, offre un exemple de cette veine de la politique américaine. Depuis des jours, les commentateurs conservateurs accusent le président de vouloir être aimé des ennemis de l'Amérique, de vouloir s'excuser au nom de l'Amérique, bref, d'avoir honte de son pays.

 

Mitt Romney, qui réchauffe ses moteurs pour la prochaine campagne de 2012, est sorti de son mutisme des derniers mois pour critiquer Obama cette semaine.

«C'est une bonne idée de tendre la main aux autres nations. Mais il est important de ne pas s'excuser. L'Amérique n'a jamais dit aux autres nations quoi faire. L'Amérique a sacrifié ses soldats pour aider les gens des autres pays à être libres.»

Le double langage ici est évident. En 2006, la secrétaire d'État de l'époque, Condoleezza Rice, avait fait les manchettes en Égypte, après avoir déclaré durant un passage dans ce pays: «Durant 60 ans, mon pays, les États-Unis, a cherché à favoriser la stabilité aux dépens de la démocratie au Moyen-Orient, et nous n'avons accompli aucun des deux.»

Dans les grandes règles non écrites de la politique et des médias américains, un républicain qui admet un tort est lucide et courageux, alors qu'un démocrate qui fait de même est faible et place son pays en danger.

Il m'arrive parfois d'imaginer ce que les conservateurs auraient dit si les guerres bâclées en Irak et en Afghanistan avaient été déclenchées par un président démocrate. Les conservateurs seraient furieux, hors d'eux. Ils frapperaient le plancher du ring à grands coups de poing et feraient crier la foule en grimpant dans les câbles.

Pendant ce temps, les guerriers discrédités continuent de dispenser leurs opinions. Le mois dernier, l'ex-vice-président Dick Cheney a prononcé un discours sur la torture le jour même d'une allocution d'Obama sur le sujet. Les médias ont présenté la chose comme un duel entre deux titans, un débat d'idées sain et excitant.

Seuls quelques journalistes se sont donné la peine d'examiner les faits. Ils ont trouvé le discours de Cheney truffé d'erreurs et de demi-vérités. Exactement comme la rhétorique simpliste qui a mené les États-Unis en guerre sous le règne de Bush.

Dans l'arène de la politique, les démocrates ont aussi leurs trucs. Barack Obama n'est pas lui-même étranger à l'usage de ces faux-fuyants. Mais ses méthodes sont plus subtiles.

Récemment, le président a admis trouver que Washington était plus difficile à changer qu'il ne le croyait, «comme un gros paquebot que l'on ne fait pas facilement changer de cap».

Le président viendrait-il de remplacer son slogan «Changement» par «L'art du possible»? Cela ne va-t-il pas à l'encontre de tout ce qu'il a promis à chaque jour de sa campagne présidentielle l'an dernier?

La question ne lui a pas encore été posée. La preuve qu'Obama sait faire un saut du troisième câble et atterrir sur la pointe des pieds.