Le président russe Dmitri Medvedev a limogé jeudi Mourat Ziazikov, dirigeant de l'Ingouchie, république du Caucase russe en proie à l'instabilité, une décision saluée par les défenseurs des droits de l'Homme qui comptent sur son successeur pour arrêter la spirale des violences.

M. Medvedev a mis fin aux fonctions de M. Ziazikov et nommé Iounous-Bek Evkourov, chef-adjoint de l'état-major de la région militaire de l'Oural et de la Volga, président par intérim de cette république, a annoncé le service de presse du Kremlin.

Mourat Ziazikov, un ancien général du KGB qui dirigeait l'Ingouchie depuis 2002, a aussitôt affirmé qu'il avait démissionné «de son plein gré» et que cette décision était liée à l'attribution de nouvelles fonctions. «Je vais travailler à Moscou», a-t-il dit à l'agence Interfax.

Depuis 2002, les enlèvements et exécutions sommaires imputés aux forces de l'ordre se sont banalisés en Ingouchie, voisine de la Tchétchénie, tandis qu'une rébellion aux accents islamistes multiplie les meurtres de policiers et militaires.

«Cette décision offre une chance de stopper la spirale des violences et d'arrêter la vendetta en Ingouchie qui était liée ces derniers mois au nom de Ziazikov», a déclaré à l'AFP Alexandre Tcherkassov, spécialiste de la région à l'ONG russe Memorial.

Selon lui, l'opération «antiterroriste» déclenchée par M. Ziazikov dès son arrivée au pouvoir en 2002 a dressé une partie de la population contre les forces de l'ordre. «Ces dernières années, les Ingouches faisant partie des forces de l'ordre et les Ingouches de la clandestinité s'entretuaient».

L'opposition ingouche a aussi salué le départ de Mourat Ziazikov. «L'ennemi du peuple ingouche limogé», «félicitations à tous les habitants de l'Ingouchie», «Evkourov est connu comme étant un homme courageux et honnête», écrit le site d'opposition ingushetia.org.

Iounous-Bek Evkourov, 45 ans et héros de la Russie, s'est distingué en 1999 à la tête de l'unité des parachutistes russes qui est entrée au Kosovo et a alors occupé l'aéroport international.

«L'effusion de sang s'arrêtera aujourd'hui, c'est sûr», a pour sa part déclaré Rosa Malsagova, rédactrice en chef d'ingushetia.org sur la radio Echo de Moscou.

Le propriétaire de ce site, Magomed Evloïev, a été tué le 31 août. Evloïev avait été interpellé à l'aéroport de Nazran, principale ville ingouche, à la descente d'un avion également emprunté par Mourat Ziazikov, et est mort peu après d'un coup de revolver reçu dans une voiture de police. Les autorités ingouches affirment que le coup est parti accidentellement.

Selon les ONG, ce petit territoire de 400 00 habitants est plongé dans un cercle vicieux où les crimes de la rébellion alimentent une répression croissante et inversement.

L'organisation locale Machr parle de 178 enlèvements depuis 2002 dans le cadre d'opérations contre la rébellion ingouche, une mouvance aux objectifs flous si ce n'est une stratégie de la terreur proche de celle de la guérilla tchétchène au début des années 2000.

Sur la seule année 2007, l'organisation de défense des droits de l'Homme Memorial a répertorié 83 meurtres, dont 30 de civils, et 30 enlèvements de personnes, dont quatre n'ont jamais été retrouvées.

En recevant des journalistes étrangers dont un de l'AFP le 25 octobre à Magas, capitale de l'Ingouchie, M. Ziazikov a rejeté ces critiques.«Ceux qui parlent d'un conflit ici sont des malades, la seule guerre c'est celle pour développer les chantiers et les champs de patates», avait-il alors dit, considérant que ces critiques ont «des cafards dans la tête».