Confrontée à l'hostilité des civils fuyant à nouveau la guerre, la Mission de l'ONU au Congo (MONUC), sa crédibilité en jeu, tentait hier de stopper à l'arme lourde et avec des hélicoptères de combat l'avancée des forces du général rebelle prorwandais Laurent Nkunda sur la ville de Goma, capitale de la province du Nord-Kivu, dans l'est de la République démocratique du Congo (RDC).

«Les hélicoptères de la MONUC ont stoppé l'avancée du CNDP (Congrès national pour la défense du peuple, le groupe de Nkunda voué à «protéger les Tutsis»), et l'armée congolaise a repris l'offensive autour de Kibumba», a déclaré le major François Maigne, de la MONUC, à Radio-Okapi, soutenue par l'ONU.

 

La guerre a jeté sur les routes 30 000 réfugiés. «Goma est une ville morte, les humanitaires se préparent à l'évacuer, le pire est à craindre si l'agression n'est pas stoppée», lit-on sur le site Web de la Société civile du Congo.

Neuf ans d'impuissance

Le général espagnol Vicente Diaz de Villegas, chef de la MONUC, a démissionné lundi, estimant que ses 17 000 hommes et son budget de 1,1 milliard de dollars ne suffisent pas pour pacifier l'est du pays. Son patron civil, le Britannique Alan Doss, a exprimé le même avis au Conseil de sécurité début octobre.

C'est la plus importante mission de paix de l'ONU, mais elle n'a pu, depuis sa création en 1999, pacifier l'est du Congo et rétablir l'autorité de l'État sur tout le territoire national.

Les suspicions envers la MONUC ne se limitent pas aux civils qui ont attaqué des bases et des véhicules onusiens dans le Nord-Kivu. Deux grands quotidiens de Kinshasa s'en sont fait l'écho hier, y ajoutant leurs propres interrogations. «Pour qui roule la MONUC?» demande Le Potentiel en éditorial. Le journal cite «des responsables congolais» selon lesquels «deux bataillons rwandais appuient la rébellion de Nkunda contre l'État». Il dénonce «la duplicité de la MONUC» dans sa «gestion de la guerre» car elle se garde bien d'en finir une fois pour toutes avec la rébellion de Nkunda.

Du Katanga au Kivu

«Si Goma tombait, l'ONU elle-même perdrait tout sens», poursuit le journal, qui rappelle qu'en 1960 déjà, l'ONU n'avait pu écraser la sécession du Katanga sous Moïse Tschombé. Évoquant une éventuelle sécession du Kivu sous Nkunda, il dénonce un nouveau «plan machiavélique de balkanisation» du Congo.

Pour Le Phare, le CNDP vise «la libération totale du Congo» depuis que Nkunda a appelé à «un soulèvement national». Le Conseil de sécurité «est sorti de sa somnolence» pour lui adresser «une sévère mise en garde» alors que, écrit le journal, il est en rébellion ouverte contre l'État et doit être arrêté et jugé.

«À quel jeu se livre la MONUC?» demande le quotidien, qui souligne que les Casques bleus se contentent de geler la situation militaire, traitant l'armée de la RDC et les rebelles de Nkunda sur un pied égal. Et il dénonce carrément «les tuteurs» de la RDC, qui assurent aux rebelles «des protections suspectes».