Somchai Wongsawat, beau-frère du dirigeant déchu Thaksin Shinawatra, a été confortablement élu mercredi 26e premier ministre du royaume de Thaïlande, en dépit des menaces de manifestants qui ont juré de le faire tomber.

M. Somchai, candidat du Parti du pouvoir du peuple (PPP), a reçu le soutien de 298 des 466 députés ayant voté au Parlement, tandis que le chef de l'opposition a recueilli 163 voix. Cinq députés se sont abstenus.

Outre le PPP, M. Somchai a bénéficié d'un appui sans faille des cinq autres formations de la coalition gouvernementale sortante, issue des élections du 23 décembre 2007.

«Je remercie tous les parlementaires qui sont venus aujourd'hui voter pour moi. Je travaillerai au mieux de mes capacités», a dit le premier ministre élu qui ne prendra ses fonctions que lorsque le roi Bhumibol Adulyadej aura donné son assentiment par écrit.

M. Somchai, 61 ans, juriste de formation, remplacera Samak Sundaravej, 73 ans, contraint de démissionner la semaine dernière après avoir été la cible de manifestants royalistes et d'une décision de justice.

MM. Somchai et Samak appartiennent au même parti politique, le PPP, au sein duquel sont regroupés tous les alliés de M. Thaksin, qui avait gouverné la Thaïlande de 2001 à 2006 avant d'être renversé par l'armée et de s'exiler en Grande-Bretagne à la suite d'accusations de corruption.

Coïncidence ? La Cour suprême a reporté mercredi son verdict dans une affaire de corruption visant M. Thaksin et son épouse, et a lancé un nouveau mandat d'arrêt contre le couple afin qu'il soit présent lors du jugement, désormais fixé au 21 octobre.

M. Samak avait dû démissionner le 9 septembre après avoir été reconnu coupable par la Cour constitutionnelle d'avoir accepté de l'argent d'une entreprise privée produisant ses émissions culinaires à la télévision.

Le premier ministre sortant était déjà considérablement affaibli par l'occupation depuis le 26 août du complexe abritant ses bureaux à Bangkok par des milliers de manifestants qui l'accusaient d'être un «homme de paille» de M. Thaksin.

Les leaders de ces opposants n'ont cessé d'affirmer qu'ils rejetteraient M. Somchai ou tout candidat issu du PPP.

«Nous savons tous que (Somchai) est le beau-frère de Thaksin. Il a des relations étroites avec le suspect qui s'est enfui (en Grande-Bretagne). Il est non seulement le candidat désigné (par Thaksin) mais a aussi une relation directe (avec lui). Comment les gens peuvent-ils accepter cela?», a lancé Somsak Kosaisuk, un des meneurs des manifestants de «Government House».

Le nouveau premier ministre s'est pourtant montré conciliant. «Il est temps d'oeuvrer à la réconciliation nationale» et de «faire de la Thaïlande un pays où il fait bon vivre», a-t-il dit, affirmant n'entretenir «aucune haine contre quinconque».

Mais le chef de l'opposition parlementaire, Abhisit Vejjajiva, l'a sommé d'agir vite. M. Samak «doit clairement indiquer comment il va désamorcer (la crise). Il doit se mettre au travail pour lever les doutes (sur son indépendance vis-à-vis de Thaksin)».

Mardi, M. Somchai avait réussi à amadouer une faction réfractaire du PPP, qui avait fini par se rallier à sa candidature, sans qu'on n'en connaisse les contreparties.

La Thaïlande reste profondément divisée entre partisans et adversaires de M. Thaksin, puissant homme d'affaires de 59 ans qui était revenu en Thaïlande après l'installation du gouvernement PPP en février mais en était reparti en août après la condamnation de son épouse Pojaman pour fraude fiscale.

Les régions rurales du nord et nord-est du royaume sont largement favorables à M. Thaksin, tandis que les zones urbanisées du sud lui sont majoritairement hostiles.