Les vives tensions en Bolivie, qui ont déclenché une crise diplomatique entre La Paz et Washington, se sont aggravées jeudi avec des affrontements faisant au moins quatre morts tandis que le président Morales avertissait que sa patience «avait des limites».

Alors que les manifestations anti-gouvernementales se poursuivent dans les cinq régions du pays, les heurts entre partisans du gouvernement socialiste et militants d'opposition ont fait jeudi au moins quatre morts et une dizaine de blessés dans le département de Pando (nord) selon le vice-ministre de l'intérieur Ruben Gamarra.

Devant les affrontements sporadiques mais violents en Bolivie, le président vénézuélien Hugo Chavez, proche allié de M. Morales, s'est autorisé lui-même à intervenir en Bolivie. «Si Evo était renversé ou tué, qu'ils sachent, les putchistes de Bolivie, qu'ils m'ont donné le feu vert pour soutenir tout mouvement armé» a prévenu M. Chavez dans un message télévisé tout en assurant qu'il «voulait la paix».

Face aux manifestations anti-gouvernementales, le chef de l'Etat bolivien a averti l'opposition que «la patience a des limites». «Nous allons faire preuve de patience, de prudence, comme toujours tenter d'éviter la confrontation, nous allons faire le gros dos, mais la patience a des limites», a-t-il affirmé.

Le président socialiste avait exigé mercredi l'expulsion de l'ambassadeur américain, Philip Goldberg, accusé d'encourager les divisions.

«La décision du président Morales est une grave erreur qui a sérieusement mis à mal les relations bilatérales» a rétorqué jeudi le porte-parole du département d'Etat, Sean McCormack.

En signe d'apaisement, le ministre bolivien de la présidence, Juan Ramon Quitana, a assuré jeudi que la déclaration de persona non grata de l'ambassadeur n'entraînait pas «nécessairement» la rupture des relations diplomatiques.

Le gouvernement de gauche a dénoncé une «menace de guerre civile» de la part de «groupes fascistes».

Evo Morales, premier président indigène de l'histoire de la Bolivie, tenant de l'anti-libéralisme, est confronté depuis des mois à la fronde de cinq des neuf gouverneurs provinciaux, qui refusent un projet de constitution qualifiée d'«étatiste et indigéniste» par les opposants de droite qui réclament la reconnaissance des autonomies régionales.

Ce projet devrait être soumis à un référendum le 7 décembre.

Depuis mardi, des manifestations sporadiques mais violentes, notamment de la part de groupes étudiants, ont éclaté dans les provinces de Santa Cruz, dans l'est du pays, et Tarija (sud), en soutien aux gouverneurs autonomistes de ces régions.

L'ambassadeur américain, Philip Goldberg, était depuis plusieurs mois dans la ligne de mire des autorités. Il n'a pas spécialement «le profil bas et incarne une diplomatie dure», a déclaré à l'AFP Hervé Do Alto, chercheur en sciences politiques basé à La Paz, estimant que la décision de le déclarer persona non grata faisait partie d'«un processus qui n'a rien de surprenant».

A plusieurs reprises, le gouvernement s'en était pris à l'ambassadeur à propos du rôle que les Etats-Unis entendent jouer dans la lutte contre la culture de la coca, qui sert à la fabrication de la cocaïne. Il avait également accusé l'USAID de rétribuer les opposants de droite.

Le gouvernement a été surtout irrité par une récente rencontre entre l'ambassadeur américain et le gouverneur de Santa Cruz, Ruben Costas, le plus farouche opposant libéral au président Morales.

L'approvisionnement du Brésil en gaz naturel a une nouvelle fois diminué jeudi à cause de la prise de contrôle par les manifestants d'une nouvelle station de pompage dans la région de Chuquisaca (sud-ouest) opéré par la compagnie franco-brésilienne Transierra.

Depuis trois jours la Bolivie ne parvient à fournir au Brésil que 11 millions de Mètres cubes par jours (MMCJ) sur un total de 31 MMCJ prévus.