Lance Augustin n'est pas un type aventurier, c'est lui qui le dit. Lorsque les autorités ont prévenu que l'ouragan Gustav pourrait faire autant, sinon plus de dommages que Katrina, ce résidant de La Nouvelle-Orléans a plié bagage sans hésiter, comme il l'avait fait il y a trois ans.

Rencontré hier matin devant une maison placardée de Baton Rouge, à 150 km de chez lui, l'homme dans la quarantaine filmait les nuages qui défilaient aussi vite que des voitures de course. C'est dans la maison de son oncle qu'il a passé la tempête avec une douzaine de frères, soeurs et cousins.

« J'ai grandi à La Nouvelle-Orléans, il y a eu des tempêtes toute ma vie, a-t-il confié, mais je commence à en avoir ras le bol. Si Gustav fait autant de dommages qu'on le craint, je déménage. J'en ai assez de fuir tout le temps. »

Dix jours après Katrina, sa maison du Lower Ninth Ward, le quartier le plus éprouvé, baignait toujours dans un mètre et demi d'eau. Il a mis trois mois à la reconstruire. Plusieurs de ses voisins n'ont pas eu cette patience : des centaines de personnes qui avaient été envoyées dans des refuges au Texas, en Géorgie et en Alabama ne sont jamais revenues.

« Mon quartier ressemble à une ville fantôme, a-t-il raconté. J'ai deux filles qui ont trouvé refuge à Atlanta et elles me disent qu'elles ne reviendront peut-être pas. »

Les autorités ont eu beau investir des millions pour renforcer les digues, rares sont ceux qui sont rassurés. Lance Augustin fait valoir que l'érosion gruge les barrières naturelles de la Louisiane. L'équivalent d'un terrain de football en marécages est emporté dans le golfe du Mexique chaque jour.

« Ça m'inquiète », reconnaît Miguel Brooks, résidant de l'est du centre-ville qui a aussi trouvé refuge à Baton Rouge. Même si son quartier avait été relativement épargné la dernière fois, il n'a pas pris de risque cette fois-ci.

Comme plusieurs maisons à Baton Rouge, celle où il a passé la nuit était couverte de planches de bois. Les comptoirs ont été remplis de conserves et plusieurs bidons d'eau sont rangés dans la cuisine. N'empêche, le jeune homme n'avait qu'une idée en tête : rentrer chez lui.

« Je ne sais pas quelle sera la force de l'ouragan, a-t-il dit. Mais j'ai vraiment peur de ce que je vais découvrir en arrivant chez moi. »