L'état d'urgence a été décrété à Bangkok, quelques heures après de violents affrontements entre partisans et adversaires du Premier ministre thaïlandais Samak Sundaravej, dont des milliers d'opposants continuent d'exiger la démission en occupant le siège du gouvernement.

«En raison des violences nocturnes qui ont troublé l'ordre dans le pays et (qui) sont allées à l'encontre des lois, le gouvernement a déclaré l'état d'urgence (à Bangkok), ce qui affectera les libertés individuelles», a annoncé le gouvernement cité par la radio d'Etat.

Les heurts ont fait un mort et 44 blessés, dont trois par balles, selon le Centre d'urgence national.

«Un homme de 53 ans est mort après avoir été battu à l'aide d'objets contondants. Il est décédé dans un hôpital public», a-t-il dit.

M. Samak a nommé le commandant en chef de l'armée, le général Anupong Paojinda, à la tête d'une équipe chargée de faire appliquer la mesure d'exception.

«En vertu de l'état d'urgence, Anupong peut interdire l'accès à certains endroits et contraindre les gens à quitter n'importe quel lieu», a ajouté la radio.

Les rassemblements de plus de cinq personnes sont désormais proscrits.

Dans la nuit, des milliers de manifestants pro et anti-gouvernementaux se sont affrontés à Bangkok, selon la police, qui a fait état de coups de feu et a demandé à l'armée de lui prêter main forte.

Les deux groupes de manifestants se sont opposés violemment non loin du siège du gouvernement, occupé depuis une semaine par des milliers de partisans de l'Alliance du peuple pour la démocratie (PAD), coalition hétéroclite de militants nationalistes, royalistes et syndicaux.

Ils réclament la tête de Samak Sundaravej, 73 ans, qu'ils accusent d'être la «marionnette» de l'ancien Premier ministre de Thaïlande, Thaksin Shinawatra, renversé par un coup d'Etat en 2006 et réfugié en Grande-Bretagne après des accusations de corruption.

Peu après la proclamation de l'état d'urgence, le principal leader des manifestants a exhorté 5 000 de ses partisans à ne pas céder.

«Vous ne devez pas avoir peur de l'état d'urgence», a lancé Sondhi Limthongkul, fondateur de la PAD, dont les militants sont barricadés à l'intérieur du siège du gouvernement.

De son côté, Samak Sundaravej, jusqu'ici réticent à recourir à la force pour déloger les manifestants, a déclaré mardi que les protestataires devaient quitter les lieux.

«Ils doivent être déplacés de Government House», a déclaré M. Samak dans une

conférence de presse retransmise en direct à la télévision depuis le quartier-général de l'armée.

«Je n'avais d'autre choix que de déclarer l'état d'urgence à Bangkok pour régler le problème une fois pour toutes. L'armée et la police feront appliquer (l'état d'urgence)», a ajouté M. Samak qui a exclu de démissionner ou de dissoudre le Parlement.

Lundi, la principale confédération syndicale, la State Enterprises Workers' Relations Confederation (43 syndicats, 200 000 membres), avait appelé à des débrayages à partir de mercredi, menaçant de couper l'eau et l'électricité aux agences du gouvernement.

En 2006, la PAD avait contribué, également par des actions dans la capitale thaïlandaise, à déstabiliser M. Thaksin avant son renversement par des généraux royalistes.

Le parti de M. Samak, dominé par des lieutenants de M. Thaksin, avait largement remporté en décembre dernier les premières élections législatives depuis le putsch.

Hostile à toute démocratie populaire qui «encourage la corruption», la PAD a proposé en juillet un nouveau système politique dans lequel 70% des parlementaires seraient nommés, et non élus.