Dans des voitures bourrées d'effets personnels, des Louisianais ayant fui l'ouragan Gustav croisent sur une autoroute des sauveteurs prêts à intervenir, mais qui ne savent pas encore quelle sera l'ampleur de leur mission.

Alors que l'oeil du cyclone de catégorie 2 a touché lundi matin les côtes de la Louisiane, la ville de Beaumont (Texas), située à 400 km à l'est de la Nouvelle-Orléans, a été elle aussi en grande partie évacuée et présente l'allure d'une ville fantôme.

«Merci de nous faire travailler», indique une grande pancarte, aussitôt démentie par les volets de fer hermétiquement fermés sur les vitrines d'une station service. Ailleurs, les pompes à sec ont été emballées dans d'épais films de plastique noir et des nuées d'oiseaux picorent sur les routes désertes.

C'est dans l'un des rares hôtels encore ouverts à côté de l'autoroute I-10 que s'est rassemblé un groupe de 45 volontaires de la 136e division aérienne de la Garde nationale du Texas, mobilisés sous commandement fédéral et qui se tiennent prêts à aller vers l'est, dans le sillage de Gustav, dont l'ampleur des destructions reste encore inconnue.

«Nous aurons l'une de ces trois missions: soit rentrer à la maison, soit aller vers l'est, soit rester ici. Nous attendons les ordres», explique le capitaine Wayne Sanaghan, porte-parole de l'unité basée à Fort Worth, dans le centre de l'État.

La 136e a déjà évacué 200 patients de la région de Beaumont, l'une des dernières villes avant la frontière de la Louisiane: «des gens qui doivent évacuer pour des raisons médicales, qui ne peuvent pas évacuer tout seuls, et dont les ambulances ne peuvent pas s'occuper», explique le capitaine Sanaghan.

«Mais pour chaque patient, il y avait des membres de leur famille, des enfants, des chats, des chiens... on m'a dit qu'il y avait un lézard, je ne l'ai pas vu», raconte le militaire.

Alors que le vent forcit et que le ciel s'assombrit, prémices de Gustav qui doit passer au nord-est de Beaumont selon les dernières prévisions, les places de parking de l'hôtel sont quasiment toutes occupées par des voitures aux plaques louisianaises.

Jamie Toups, une jeune femme accompagnée de sa petite fille, raconte avoir évacué dimanche de Cow Island, à 200 km à l'ouest de La Nouvelle-Orléans. «Nous avons pris beaucoup de petites routes» pour éviter les embouteillages formés par les évacués, explique-t-elle.

«C'est épuisant, nerveusement», dit-elle, alors que les clients de l'hôtel passent et repassent devant la télévision du hall qui diffuse en continu des nouvelles de l'avancée de Gustav dans les terres. La région où habite Mme Toups n'avait pas été touchée directement par l'ouragan Katrina en 2005, mais de plein fouet par le cyclone Rita, quelques semaines plus tard.

«Nous avons tout perdu à cause de Rita», raconte Mme Toups. Pense-t-elle rester vivre dans cette zone à l'avenir? «Je l'espère, il faut attendre pour voir», lance-t-elle, le sourire forcé.

«Nous sommes partis ce matin, à 4 heures», explique pour sa part Mona Istre, dont la grosse berline est remplie de vivres et de vêtements. Elle habite près de Lake Charles, à l'orée du pays cajun, et n'a pas voulu prendre de risques.

Je suis originaire de Cameron (sur la côte NDLR), où Rita a frappé et j'ai appris à obéir aux ordres d'évacuation», raconte-t-elle. «Cela me fait mal de voir des zones qui ont tant souffert être touchées à nouveau, mais on ne peut pas faire autrement que de prier».