À défaut d'obtenir une promesse d'adhésion rapide à l'Otan, l'Ukraine espère que le conflit en Géorgie poussera l'Union européenne à reconnaître dès le sommet UE-Ukraine du 9 septembre à Evian sa vocation à la rejoindre un jour.

«Avec ce qui se passe en Géorgie, ce sommet se doit d'être un succès» en reconnaissant la vocation de l'Ukraine à rejoindre le bloc européen, a déclaré jeudi le vice-ministre ukrainien des Affaires étrangères, Konstiantyn Yeliseyev.

«Nous avons besoin du soutien politique et moral de l'UE», a souligné M. Yeliseyev. Il a néanmoins refusé de préciser quelle était aujourd'hui la priorité: l'adhésion à l'UE ou celle à l'Otan, que l'ancienne république soviétique réclame plus que jamais.

«C'est comme demander à un enfant s'il préfère son père ou sa mère, il faut les deux», a répondu le vice-ministre.

Comme l'Otan, qui compte 21 pays du bloc européen, l'UE est divisée sur une possible adhésion de l'Ukraine, peut-être plus encore que sur celle de la Géorgie.

Pologne, Pays baltes, Suède et Grande-Bretagne ont toujours estimé que, l'Ukraine étant sans conteste un pays européen et que cette perspective lui était due.

Mais les pays de la «vieille Europe» y étaient opposés, soucieux d'éviter toute nouvelle promesse d'élargissement, comme de ménager la Russie.

L'Ukraine est donc restée jusqu'ici cantonnée à contre-coeur dans la politique dite de «voisinage» de l'UE, comme la Géorgie, l'Azerbaïdjan, l'Arménie ou la Moldavie. La ligne officielle de la Commission a consisté à dire que la porte de l'UE ne lui est «ni ouverte ni fermée».

La France, qui préside actuellement l'UE, a néanmoins évolué sur le sujet ces derniers mois, et a reconnu récemment l'ambassadeur d'Ukraine auprès de l'UE. Et l'intervention russe en Géorgie a conforté son basculement, selon M. Yeliseyev.

«Il n'y a plus que deux ou trois pays membres qui y soient vraiment opposés», a-t-il assuré devant quelques journalistes à Bruxelles. «Mais la position qu'ils avaient en juin-juillet ne peut pas être maintenue comme si de rien n'était. Elle doit maintenant être modifiée».

Un diplomate ukrainien a précisé à l'AFP qu'il s'agissait avant tout de l'Allemagne, des Pays-Bas et de la Belgique.

Sur ces trois pays, c'est dans le plus influent d'entre eux, l'Allemagne, que l'Ukraine place tous ses espoirs dans les 11 jours restant avant le sommet.

«Nous comptons beaucoup sur le leadership de l'Allemagne et sur son courage», a reconnu M. Yeliseyev. Kiev semble également pouvoir compter sur le soutien du commissaire européen à l'Elargissement Olli Rehn.

Estimant que l'Ukraine pourrait être «la prochaine cible des pressions politiques de la Russie», M. Rehn a jugé mercredi à Helsinki «important du point de vue de la stabilité que l'UE envoie un signal politique clair que l'intégration de l'Ukraine à l'Union est possible, si le pays poursuit son objectif de promotion de réformes conformément aux valeurs européennes».

La Commission a néanmoins pris ses distances jeudi, estimant que ces propos n'avaient pas été rapportés avec exactitude par les médias.

Kiev espère maintenant que Paris utilisera «toute son influence» pour que l'Allemagne accepte la reconnaissance d'une perspective d'adhésion dans la déclaration politique qui doit être publiée au sommet d'Evian.

Jusqu'ici, Berlin a insisté pour que cette déclaration souligne que «personne ne peut préjuger de l'avenir», selon un diplomate ukrainien.

L'Allemagne fait valoir à l'Ukraine que sans cette phrase, elle s'opposera à ce que l'accord de partenariat renforcé actuellement en négociation entre l'UE et l'Ukraine soit nommé «accord d'association» , a expliqué ce diplomate.

Kiev tient à cette appellation, précisément parce qu'elle a été utilisée pour des pays dont la vocation à rejoindre l'UE a depuis été reconnue: la Pologne dans les années 1990, les pays des Balkans aujourd'hui.