Après cinq jours d'hostilités, le président Dmitri Medvedev a annoncé hier la fin de l'opération militaire russe dans la province séparatiste géorgienne d'Ossétie-du-Sud. «L'agresseur est puni», a-t-il déclaré. Quelques heures plus tard, la Russie et la Géorgie acceptaient un plan de paix négocié par la France.

À Vladikavkaz, capitale de l'Ossétie-du-Nord (en Russie), les réfugiés criaient victoire face à une Géorgie défaite. Mais le ressentiment était grand envers l'Occident, accusé d'avoir pris fait et cause pour l'«agresseur».

«Dites-moi, pourquoi vous mentez? Pourquoi les médias chez vous disent que ce sont les Russes qui ont agressé?» interroge Ivan, un chauffeur de taxi de Vladikavkaz. La question, amplement relayée dans les médias russes, revenait chez pratiquement chaque interlocuteur hier dans la capitale d'Ossétie-du-Nord.



Pour les Ossètes, du Nord comme du Sud, il ne fait aucun doute que le premier ministre russe Vladimir Poutine avait trouvé le bon mot en fin de semaine dernière pour décrire l'invasion géorgienne de la minuscule république sécessionniste: «génocide».

«Notre relation avec les Géorgiens est celle qu'on a avec des voisins qui veulent nous éliminer en tant que nation», résume d'un ton sec Aliona, 23 ans, assise sur le lit de sa mère à l'Hôpital des premiers soins de Vladikavkaz.

Depuis la fin de la guerre d'indépendance contre Tbilissi en 1992, la situation a toujours été tendue en Ossétie-du-Sud. Mais même s'ils étaient habitués aux fusillades régulières à la frontière avec la Géorgie, les Ossètes du Sud n'auraient jamais pensé que le président géorgien Mikheïl Saakachvili lancerait un jour une attaque d'une si grande envergure, détruisant presque entièrement leur petite capitale Tskhinvali.

«Personne ne croyait que ça irait jusque là», assure la mère d'Aliona, Zalina Ostaïeva, couchée sur son lit d'hôpital, bandage au bras. «Sinon, nous aurions évacués les femmes et les enfants bien avant», ajoute son mari Zorik Kotchiev.

Zalina, qui habite un petit village en banlieue de Tskhinvali, se réjouit tout de même d'avoir survécu aux tirs des troupes géorgiennes alors qu'elle prenait la fuite, au lendemain des premiers bombardements.

Sa maison a été détruite, on lui a retiré une balle du bras, mais toute sa famille est en vie. Même son mari, qui après être allé la reconduire à la frontière de l'Ossétie-du-Nord, est revenu «défendre sa patrie», arme automatique à la main.

Leurs voisins n'ont pas eu la même chance. Comme eux, ils ont voulu fuir en voiture. Mais un obus a frappé leur automobile. «Les deux enfants ont survécu, le père et la mère sont morts brûlés», raconte Zalina.

Bush condamné

Aliona s'emporte lorsqu'on remet en question le bilan des victimes russo-ossètes, établi à plus de 2000 morts et jugé «mensonge flagrant» par le gouvernement géorgien. «Il y a tellement de corps dans Tskhinvali qu'il est impossible de les compter», répond la jeune femme.

Son père arrive tout de même à trouver un point positif à ce conflit. «La seule chose qui me rend heureux dans cette guerre, c'est de savoir qu'on ne vivra plus jamais avec eux, les Géorgiens. Maintenant, nous avons vu ce qu'ils sont capables de faire», dit Zorik Kotchiev. Il espère désormais que la communauté internationale ne laissera plus le président Saakachvili utiliser la force pour régler ses conflits avec les séparatistes.

Mais personne ne croit plus vraiment en l'Occident pour les protéger.

Les Ossètes rencontrés s'indignaient tous que le président américain George W. Bush, un très bon ami de Saakachvili, ait condamné la réplique «disproportionnée» de la Russie, alors que la Maison-Blanche ne reconnaissait que du bout des lèvres la possible responsabilité de Tbilissi dans cette guerre.