Après le coup de force de la Russie en Géorgie, l'Union européenne est amenée à repenser la question de l'éventuelle entrée de l'Ukraine dans le giron communautaire. Alors que ce véritable enjeu sera au centre des discussions dans dix jours lors d'un sommet à Évian, les Vingt-Sept se montrent divisés, les uns souhaitant un ancrage rapide et protecteur dans l'UE, les autres redoutant l'arrivée d'un flux de travailleurs low-cost.

Le 9 septembre, l'Ukraine espère être reconnue pour la première fois comme un candidat potentiel à l'entrée dans l'Union européenne, à l'occasion de ce sommet UE-Ukraine sur le lac Léman placé sous la présidence de Nicolas Sarkozy. Le pays souhaite également évoquer les questions de la libre circulation de ses citoyens et du libre-échange.

Pour l'heure, les Européens sont divisés sur la question ukrainienne. La France, la Grande-Bretagne et d'autres pays du nord et de l'est de l'Europe souhaitent entraîner Kiev dans le giron européen. En revanche, l'Allemagne, l'Espagne et l'Autriche ont longtemps eu des réticences, expliquant que le pays n'était pas prêt à rejoindre l'UE et redoutant l'arrivée d'un flux de travailleurs à bas salaire.

Ces freins expliquent que la perspective d'une entrée dans l'UE a longtemps été refusée à l'Ukraine. Mais du fait de l'attitude de la Russie en Géorgie, la stratégie européenne est amenée à être repensée.

«Les discussions sur le statut de l'Ukraine comme candidat à l'entrée dans l'Union ne sont pas à l'agenda pour le moment», a assuré cette semaine le commissaire européen à l'Elargissement Olli Rehn dans un discours à Helsinki. Mais il a vite ajouté: «Nous ne devrions jamais dire 'jamais» à l'Ukraine», laissant entendre que le pays «pourrait être la prochaine cible de la pression politique de la Russie».

Selon M. Rehn, pour préserver la stabilité de l'Union, les gouvernements européens doivent «donner un signe politique clair montrant qu'un rapprochement entre l'UE et l'Ukraine est possible».

De son côté, Kiev déclare avoir besoin de meilleures garanties pour assurer sa sécurité face à Moscou. «Les événements actuels en Géorgie ont clairement montré» que le programme européen d'aide économique envers ses voisins «a complètement échoué», a dénoncé cette semaine à Bruxelles Constantin Elisyeïev, vice-ministre ukrainien des Affaires étrangères. Pour lui, «faire comme si de rien n'était après ce qui est arrivé en Géorgie constitue une erreur».

Alors que le vice-président américain Dick Cheney entamera la semaine prochaine une tournée européenne qui le conduira notamment en Géorgie et en Ukraine, le Premier ministre russe Vladimir Poutine a dit samedi à la chaîne allemande ARD qu'accuser la Russie de vouloir remettre en cause l'intégrité territoriale de l'Ukraine équivalait à une «provocation».

Lorsqu'on lui a demandé si la Crimée était le prochain objectif russe, M. Poutine a démenti, observant qu'il n'y avait aucun objectif que ce soit et rappelant et qu'un accord russo-ukrainien faisait de Sébastopol le port d'attache de la Flotte russe de la mer Noire jusqu'en 2017.