Une nouvelle polémique a éclaté entre le chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi et les magistrats sur la réforme de la justice attendue à la rentrée, le principal syndicat de la profession allant jusqu'à évoquer le spectre du fascisme.

La polémique a été relancée par des déclarations jeudi du chef du gouvernement qui a confirmé une réforme d'ampleur de la justice à la rentrée et évoqué la figure très respectée du juge Giovanni Falcone, le magistrat assassiné par la mafia en 1992, pour la justifier.

Silvio Berlusconi a cité la séparation des carrières entre les juges et les procureurs et l'introduction de critères pour évaluer la carrière des magistrats, des mesures qui font craindre aux magistrats la perte de leur indépendance.

Le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) qui nomme et gère la carrières des magistrats serait aussi réformé avec une réduction des représentants des juges au profit des personnalités élus par le Parlement.

Jeudi soir, le secrétaire de l'Association nationale des magistrats (ANM, principal syndicat de la profession), Giuseppe Cascini, n'a pas hésité à évoquer le spectre du fascisme.

«Si nous introduisons la politique au sein du CSM et changeons sa compétence et sa composition, nous risquons de prendre pour référence un modèle autoritaire, c'est-à-dire celui du fascisme», a-t-il déclaré.

«Avec ce projet, Berlusconi ne veut pas réformer la justice mais punir les juges», a déclaré vendredi à l'AFP Luca Palamara, le président de l'ANM.

Le chef du gouvernement, poursuivi dans une dizaine d'affaires mais jamais condamné définitivement et qui a des rapports exécrables avec les magistrats, a fait voter en juillet une loi qui lui garantit l'immunité pénale pendant la durée de son mandat.

La référence par Berlusconi à la figure très respectée du juge Falcone - «Il s'agira de mettre en pratique de nombreuses idées de Giovanni Falcone» - a aussi fait bondir les magistrats.

«Malheureusement, Falcone ne peut plus répondre et Berlusconi l'instrumentalise», a accusé Luca Palamara.

L'ex-juge anti-corruption Antonio Di Pietro a eu des mots encore plus durs. «Que Berlusconi laisse Falcone tranquille. C'est comme si le diable parlait d'eau bénite», a-t-il déclaré, accusant Berlusconi d'avoir soutenu la candidature au Parlement d'hommes politiques condamnés pour avoir soutenu la mafia.

Pour l'ANM, la séparation des carrières risquent de faire perdre leur indépendance aux procureurs, actuellement totale, et l'organisation redoute qu'ils soient «placés sous l'autorité du ministre de la Justice».

«Nous ne voulons pas retourner en arrière», souligne Luca Palamara rappelant que la Constitution de 1948 à cherché à protéger l'indépendance des magistrats après l'époque du fascisme où ils étaient soumis au pouvoir politique.

C'est la deuxième fois en un mois que le spectre du fascisme est évoqué en Italie depuis le retour de Silvio Berlusconi au pouvoir en mai 2008, après les critiques virulentes de l'hebdomadaire catholique Famiglia Cristiana sur la politique du gouvernement à l'égard des immigrés.