Le dalaï lama a dénoncé la poursuite de la répression chinoise au Tibet, indiquant que 400 personnes avaient été tuées depuis les émeutes de mars dans la seule région de Lhassa, dans une interview au quotidien français Le Monde.

Le journal cite le dalaï lama, en visite en France, sur le fait que des tirs de soldats chinois auraient fait 140 morts, lundi dans l'est du Tibet, mais le bureau du chef spirituel tibétain a ensuite démenti un tel bilan.

«En réponse à une question du journaliste (du Monde) concernant des nouvelles récentes selon lesquelles les troupes chinoises auraient tiré sur une foule de manifestants, Sa Sainteté a clairement répondu que nous n'avions pas d'informations spécifiques concernant le nombre de victimes», indique un communiqué du bureau du dalaï lama.

«Dans cette interview, Sa Sainteté a dit : +Nous avons simplement reçu cette nouvelle, mais sans pouvoir la confirmer. Donc, je ne sais pas+.», poursuit le texte.

«Depuis la réception de ces nouvelles, tous les efforts faits pour communiquer avec la population locale affectée par ces événements à Kardzé (Kham, est du Tibet, province du Sichuan) ont échoué», selon le texte.

La citation du dalaï lama rapportée par Le Monde était la suivante: «l'armée chinoise a encore tiré sur la foule, lundi 18 août, dans la région de Kham, dans l'est du Tibet: cent quarante Tibétains auraient été tués, mais ce chiffre demande à être confirmé».

Dans un «rectificatif» publié sur son site Internet, Le Monde indique: «Interrogé sur le chiffre de +140 tués+, entendu dans son entourage et évoqué avec lui lors d'un entretien recueilli à Nantes, le dalaï lama a répondu que cette estimation demandait à être confirmée».

Le représentant du dalaï lama à Genève, Tseten Samdup Chhoekyapa, a indiqué à l'AFP que selon une source «fiable», les «forces de sécurité chinoises ont tiré» sur des manifestants à Kardzé.

«On nous a dit qu'il y avait eu des victimes, mais nous n'avons pas pu préciser ce que cela voulait dire, si des personnes avaient été tuées ou bien blessées», a-t-il ajouté.

Le dalaï lama a assuré au Monde que depuis le début des émeutes, le 10 mars, «des témoins fiables ont pu établir que 400 personnes ont été tuées dans la seule région de Lhassa. Tuées par balles, alors qu'elles manifestaient sans armes».

«Si l'on considère tout le Tibet, le nombre de victimes est bien sûr plus grand. Dix mille personnes ont été arrêtées. On ne sait pas où elles sont incarcérées», a-t-il ajouté. Le prix Nobel de la paix avance également que l'armée chinoise construit désormais «de vrais campements militaires».

Le dalaï lama a en outre estimé qu'«aucune ouverture n'a été enregistrée» dans les discussions avec Pékin. «Après les émeutes de mars et les Jeux olympiques, nous avions cru à des signaux positifs. Nous avons vite déchanté. Nos émissaires se sont heurtés à un mur», a-t-il dit.

Le chef spirituel tibétain devrait rencontrer vendredi, à l'occasion de l'inauguration d'un temple bouddhiste à Roqueredonde (sud), l'épouse du président français, Carla Bruni-Sarkozy, le chef de la diplomatie Bernard Kouchner et la secrétaire d'État aux droits de l'Homme Rama Yade.

Il s'agira de son premier contact lors de cette visite avec des membres du gouvernement. Le président Nicolas Sarkozy avait indiqué qu'il ne recevrait pas le dalaï lama car le moment était peu opportun et que le chef spirituel n'avait pas demandé à le voir.

L'opposition de gauche a fustigé l'accueil «en catimini» du dalaï lama et accusé M. Sarkozy d'avoir cédé aux pressions de Pékin.

«Mon agenda n'était pas politique», a déclaré au Monde le dalaï lama qui a dit espérer qu'après les JO «le président en exercice de l'Union européenne (M. Sarkozy) fera des propositions constructives au gouvernement chinois».