Des centaines de milliers de musulmans ont envahi vendredi la capitale d'été du Cachemire indien pour dénoncer la souveraineté de New Delhi sur une partie de ce territoire himalayen secoué par sa plus grave crise en deux décennies.

Ce rassemblement monstre s'est tenu à l'appel de séparatistes musulmans de la partie indienne du Cachemire.

Les manifestants ont marché vers le «cimetière des martyrs» où reposent bon nombre des victimes de l'insurrection séparatiste déclenchée en 1989, récupérée par des islamistes, et qui a fait au moins 43 000 morts.

Les séparatistes avaient suspendu mardi leur mouvement au lendemain d'une manifestation de dizaines de milliers de personnes exigeant des Nations unies le droit à l'autodétermination pour le Cachemire coupé en deux depuis 60 ans entre l'Inde et le Pakistan.

«Nous voulons montrer au monde que nous sommes opposés à l'occupation du Cachemire par l'Inde», a lancé le chef séparatiste Shabir Shah, entouré de milliers de drapeaux verts et noirs brandis par des hommes criant «indépendance» («azadi» en ourdou) ou portant des banderoles frappées du slogan en arabe «Allah est grand».

Les Cachemiris «veulent exercer leurs droits inaliénables à l'autodétermination» par voie référendaire, a réclamé un autre séparatiste, Mirwaiz Umar Farooq.

Plusieurs résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU imposent la tenue d'un référendum au Cachemire indien et au Cachemire pakistanais afin que la population majoritairement musulmane choisisse entre la souveraineté de New Delhi et celle d'Islamabad. Mais ces textes n'ont jamais été mis en oeuvre, notamment parce que l'Inde les jugent «obsolètes».

S'adressant à une marée humaine –200 000 personnes selon la police, au moins le double selon les organisateurs--, M. Farooq a appelé New Delhi à libérer «tous les détenus politiques» et à abroger les lois «draconiennes» qui permettent aux troupes indiennes de mater l'insurrection cachemirie.

Pour éviter tout débordement, la sécurité avait été particulièrement renforcée à Srinagar et les magasins, bureaux et écoles étaient fermés. Ils devraient le rester au moins jusqu'à lundi quand se tiendra un rassemblement silencieux au coeur de la ville.

La manifestation de vendredi s'est dispersée dans le calme, mais un jeune homme juché sur le toit d'un autobus est mort électrocuté en touchant un câble à haute tension.

Les troubles dans cet État indien du Jammu-et-Cachemire ont éclaté en juin après une décision des autorités, annulée ensuite, d'allouer des terrains à des pèlerins hindous, qui a déclenché la colère de musulmans.

Au moins 31 musulmans et trois hindous ont été tués par des tirs des forces de l'ordre indiennes à Srinagar et près de Jammu, la capitale d'hiver.

Depuis 1947, le Cachemire reste l'abcès de fixation entre l'Inde et le Pakistan, à l'origine de deux des trois guerres entre ces puissances nucléaires militaires. L'ONU surveille le respect de leur cessez-le-feu conclu en novembre 2003 le long de la Ligne de Contrôle tracée en 1949 et qui sépare le Cachemire indien du Cachemire pakistanais.