On est loin de la culture cinq fois millénaire, des chants stridents de l'opéra de Pékin ou du thé wulong servi avec raffinement. Ici, les beach girls se font plutôt aller le bassin à peine couvert sur une musique anglo-saxonne qui joue à tue-tête.

Aux compétitions de volley-ball de plage, l'annonceur maison, qui ira plus tard faire quelques pas de danse avec les jolies demoiselles, présente en ce début de match les joueuses de l'Allemagne et de l'Autriche. De sa plus belle voix FM, il présente Dorrriiiiiiiiiiiiiiiis Schwaiger, étirant les syllabes à n'en plus finir. Les beach girls, elles, quittent le stade en saluant la foule avec un sourire grand comme ça.

Messieurs, ne vous en faites pas, elles reviendront tout à l'heure pendant le Technical Time-out, comme l'annonce le tableau afficheur -qui n'a pas été programmé en français, langue officielle du CIO. En attendant, tapez du pied, c'est We will Rock You qui sort des haut-parleurs. Plus tard, les plus vieux auront droit à Let's Do The Twist.

Assis dans les dernières rangées des gradins, Ray Jin, 26 ans, admet qu'il a de la difficulté à comprendre la musique. Il a beau avoir étudié à Hong Kong, où la culture occidentale est plus présente, il ne connaît que 40% des chansons qu'on lui fait entendre.

Pourtant, précise-t-il, «la génération plus jeune peut apprécier ce sport. On a appris l'anglais, les choses ont changé tellement vite en Chine».

Et les Chinois plus âgés, peuvent-ils apprécier le volley-ball de plage? «Ils peuvent avoir des problèmes à comprendre. Ma mère, je pense qu'elle préférerait le ping-pong.»

Quelques rangées plus bas, Liang Lu a un âge suffisamment avancé pour qu'on ne le lui demande pas. Disons qu'elle pourrait facilement être la mère de Ray Jin.

Alors, Mme Liang, avez-vous du plaisir? «Oui, j'aime la musique, mais je ne connais pas toutes les chansons. J'aime beaucoup l'ambiance.»

Et le tennis de table, Mme Liang? «Je préfère le ping-pong, oui. Tout le monde peut jouer au ping-pong.»

Les beach girls reviennent sur le terrain central. On note même que l'une d'elles a le nombril percé. En tout cas, ça scintille.

Jing Yu a déjà joué au volley-ball de plage, elle connaît donc les règles et apprécie le match. «La plupart des Chinois ne connaissent pas ça, ce n'est pas très populaire, ici.»

Le premier match terminé, les athlètes chinoises font leur entrée. Même les Chinoises semblent faire 20cm de plus que les beach girls.

La musique américaine est vite enterrée par les «Zhongguo jia you!», expression devenue le cri de ralliement des Chinois pendant ces Jeux.

Et puis, changement de ton, les haut-parleurs font entendre une chanson chinoise qui a l'air de venir directement des campagnes communistes, avec un son légèrement russe. Les quatre premières notes de Ge chang zhu guo (Chanter pour ma patrie) ont à peine retenti que Ray Jin tape sur l'épaule du journaliste: «Ça, je connais!» lance-t-il, tout sourire.

Les Chinois d'abord

Quand le match de l'équipe nationale est terminé, plusieurs Chinois quittent les gradins, comme c'est fréquent dans d'autres sports. Le troisième match se déroule donc devant des gradins à moitié vides, même si tous les billets ont été vendus ou distribués.

C'est le temps d'aller causer avec Lu Yu, un des très nombreux bénévoles au stade du parc Chaoyang. Alors, Yu, aimes-tu les grandes joueuses blondes? «Oui. C'est joli, les longs cheveux blonds.»

Et comme il a vu beaucoup de matchs ici, on peut lui demander quelles joueuses sont les plus jolies. «Les Chinoises», lance-t-il sans hésiter, oubliant les jolis cheveux blonds.

Décidément, les Chinois n'en ont que pour eux, à ces Jeux.