Seize morts. Une des attaques les plus meurtrières contre les policiers chinois au cours des dernières années. Et cela, à quatre jours du début des Jeux olympiques.

Les 70 policiers qui gardent la frontière à Kashgar, dans l'extrême ouest de la Chine, faisaient leur jogging comme tous les matins. Vers 8h, lundi, un camion a foncé sur le peloton. Deux hommes en sont sortis et leur ont lancé des explosifs, rapporte l'agence officielle Xinhua.

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Quatorze policiers sont morts sur le coup. Deux autres ont succombé à leurs blessures quelques heures plus tard.

Deux suspects ont été arrêtés sur-le-champ. L'un a 28 ans, l'autre 33. Ils sont tous les deux Ouïgours, des musulmans qui parlent une langue se rapprochant du turc et qui vivent majoritairement dans la province du Xinjiang, où se trouvent Kashgar et une longue section de la Route de la soie. Un des assaillants, blessé au bras dans l'attaque, a dû être amputé.

Un Allemand interrogé par l'AFP explique avoir été réveillé par «deux énormes explosions», avant d'être consigné dans sa chambre pendant quatre heures. «(Les policiers) ont vérifié nos appareils photo numériques pour voir si nous avions des photos de l'attaque», a précisé Siegfried Maurer.

Les autorités chinoises parlent d'une «attaque terroriste présumée». Celle-ci survient alors que Pékin répète que sa priorité est d'offrir au monde des Jeux olympiques sécuritaires à compter de vendredi.

Quelque 100 000 policiers et soldats sont d'ailleurs déployés dans la capitale chinoise; 121 avions et hélicoptères de même que 33 navires sont également présents pour assurer des Jeux sans incident. Des bénévoles sont aussi sur les rangs, offrant aux policiers des informations sur d'éventuels suspects, que les policiers peuvent surveiller grâce à de nombreuses caméras de surveillance. À l'entrée de la ville, camions et voitures sont fouillés.

Hier, les organisateurs des Jeux se sont dits convaincus de pouvoir offrir des JO sécuritaires. «Nous préparons les Jeux olympiques depuis sept ans. Nous avons bon espoir de pouvoir accueillir des Jeux paisibles», a déclaré Sun Weide, porte-parole du comité organisateur.

Qui sont les Ouïgours?

Les Ouïgours, des musulmans vivant majoritairement dans la province située à la frontière de l'Afghanistan et du Pakistan, sont souvent montrés du doigt par Pékin quand il est question de terrorisme. Selon Xinhua, les policiers ont récemment récolté des «éléments suggérant que le Parti islamique du Turkestan oriental (ETIM) prévoyait de mener des attaques entre le 1er et le 8 août».

Fin juillet, le groupe, qui souhaite la création d'un État indépendant au Xinjiang, a revendiqué plusieurs attentats en Chine.

Au printemps, La Presse s'est rendue à Kashgar, où elle a constaté que les Ouïgours et les Han - l'ethnie majoritaire en Chine - vivent dans des mondes parallèles. Les communautés, pour des raisons historiques et religieuses, ne se mélangent que très peu. Le gouvernement local est aujourd'hui dominé par les Han, de plus en plus présents dans la province.

Riche en pétrole, le Xinjiang est beaucoup plus pauvre que les régions côtières chinoises. Il n'est pas rare d'y voir des mulets ou des chameaux tirer des voiturettes où s'entassent les agriculteurs et leur famille.

En 1997, des attentats à la bombe à Urumqi, la capitale de la région, ont fait neuf morts et 74 blessés dans trois autobus.

Depuis, Pékin parie qu'une plus grande croissance économique permettra aux Ouïgours de sentir que leur intérêt passe par la Chine et non par les pays musulmans.