L'ex-évêque catholique Fernando Lugo, investi vendredi à la présidence du Paraguay, a mis fin à 61 ans d'hégémonie des conservateurs et rejoint le camp renforcé des dirigeants de gauche sud-américains, tous présents à la cérémonie.

Il a été élu en avril sur une liste de coalition de gauche.

Les présidents du Venezuela Hugo Chavez, du Brésil Luiz Inacio Lula da Silva, d'Argentine Cristina Kirchner, du Chili Michele Bachelet, de Bolivie Evo Morales et d'Equateur Rafael Correa assistaient à la cérémonie sur la place du Congrès à Asuncion.

Vêtu d'une chemise blanche, d'un pantalon gris et de sandales, le président Lugo a prêté le serment de «respecter et faire respecter la Constitution» devant le président du Sénat Enrique González Quintana et l'assemblée plénière du Congrès, sous les acclamations de milliers de partisans.

Le président sortant, Nicanor Duarte (2003/2008), du parti conservateur Colorado, est en revanche sorti du siège du parlement sous les huées.

Le président du Congrès a investi le nouveau chef d'État en guarani, langue officielle avec l'espagnol du Paraguay et parlée par 80% des six millions de Paraguayens.

Lugo promis que son gouvernement saurait être «implacable avec les voleurs du peuple». Il a déploré que son pays ait jusque-là véhiculé à l'étranger surtout l'image d'une corruption endémique et d'une misère indigne.

Le nouveau président a promis de travailler pendant les cinq ans de son mandat à rendre à la nation «honorabilité et transparence».

Infiniment ému, au bord des larmes, M. Lugo s'est en outre dit reconnaissant au Vatican de lui avoir accordé une dispense émise par le pape Benoît XVI afin qu'il puisse exercer sa nouvelle charge.

«Je suis un laïc qui remercie son Eglise, attaché à sa foi et à son humble histoire», a-t-il souligné.

Lugo, surnommé «l'évêque des pauvres», dont l'élection historique avait mis un terme à 61 ans d'hégémonie du Colorado, s'est engagé à répondre aux espoirs des Paraguayens en faisant de la lutte contre la pauvreté et la réforme agraire «totale», les priorités de son gouvernement.

À la veille de son investiture, Lugo, 57 ans, a annoncé qu'il renonçait à son salaire de chef de l'État, d'un montant de 4000 dollars.

«Je n'aurai pas besoin de cet argent qui appartient aux plus humbles», a déclaré jeudi M. Lugo.

«Nous renforcerons la lutte contre l'extrême pauvreté, nous sommes engagés face à la pauvreté extrême de 20% de nos compatriotes», promettait-il cette semaine lors d'une Conférence à Asuncion.

M. Lugo y a évoqué les principaux défis auxquels son gouvernement serait confronté pour rattraper les retards du pays en matière de développement économique et social.

«La pauvreté de 35% (de la population) constitue une réalité obscène qui offense n'importe quel homme de bien», a-t-il estimé, assurant que «les dépenses publiques se concentreront sur les plus nécessiteux».

Le dirigeant a en outre annoncé qu'une «réforme agraire totale» serait l'autre axe prioritaire de sa politique.

«Ce sera, a-t-il promis, un gouvernement qui gouverne, qui gouverne bien et qui pose l'intérêt commun et le patriotisme comme seuls voies et critères pour notre nation».