Le régime du président zimbabwéen Robert Mugabe a taxé de «racisme international» les menaces de sanctions brandies par les pays du G8 contre ses dignitaires après la réélection du chef de l'État dans un scrutin où il était seul en lice.

«Ils veulent saper l'Union africaine et les efforts du président (sud-africain Thabo) Mbeki parce qu'ils sont racistes, parce qu'ils pensent que seuls les blancs pensent de manière juste», avait déjà déclaré mardi à l'AFP le ministre zimbabwéen de l'Information Bright Matonga.

En récusant la légitimité de Robert Mugabe, au pouvoir depuis l'indépendance en 1980 et réélu le 27 juin, le sommet du G8 «tente d'imposer au peuple du Zimbabwe un gouvernement dont il ne veut pas», a renchéri le ministre de l'Information Sikhanyiso Ndlovu dans l'édition de mercredi du quotidien d'État The Herald.

«Il n'est prévu nulle part dans la loi internationale qu'un groupe de pays réunis en un club privé puisse décider de la légitimité des gouvernements d'État souverains (...) C'est du racisme international», a-t-il ajouté.

Le sommet des huit puissances industrielles mondiales a fait monter la pression internationale contre le président Mugabe, se prononçant mardi pour des «mesures financières et autres» ciblées contre les responsables des violences politiques dans le pays.

Le terme de «sanctions» a toutefois été évité, ayant été réfuté par la Russie et par plusieurs dirigeants africains invités lundi au sommet.

Pour les Africains, des sanctions risquent d'entraver la médiation engagée par le président sud-africain Mbeki, mandaté par la Communauté de développement d'Afrique australe (SADC), en incitant le régime de M. Mugabe à se durcir davantage.

Le débat sur les sanctions devait se poursuivre cette semaine au sein du Conseil de sécurité des Nations unies, où l'Afrique du Sud, mais aussi la Russie, membre permanent doté à ce titre d'un pouvoir de veto, s'opposent à une proposition des États-Unis.

Les sanctions envisagées visent directement M. Mugabe et 13 hauts dirigeants zimbabwéens, avec notamment un gel de leurs avoirs à l'étranger. Elles prévoient également un embargo sur les ventes d'armes.

L'ambassadeur des États-Unis à l'ONU a déclaré mardi qu'il espérait une adoption dès cette semaine par le Conseil de sécurité, assurant qu'il n'avait pas reçu d'indications selon lesquelles la Russie ou la Chine opposeraient leur veto. Mais l'ambassadeur de Russie a estimé que le projet américain comportait des éléments «excessifs», qui entrent «en conflit avec la souveraineté» d'un État membre.

Il a aussi mis en doute la notion selon laquelle les violences politiques au Zimbabwe menaçaient la paix internationale, concept qui permet l'intervention de l'ONU.

Le leader de l'opposition zimbabwéenne Morgan Tsvangirai, qui avait devancé M. Mugabe au premier tour de la présidentielle le 29 mars avec 47,9% des suffrages contre 43,2%, s'est retiré de la course avant le second tour le 27 juin, arguant de l'intensité des violences déchaînées contre ses partisans.

Il refuse d'envisager un gouvernement d'unité nationale, préconisé par l'Union africaine (UA), appelant à un mécanisme de transition qui déboucherait sur la convocation de nouvelles élections. M. Mugabe exige que l'opposition reconnaisse sa réélection.

La prise de position du G8 peut également être interprétée comme un camouflet à M. Mbeki, dont la médiation au Zimbabwe est de plus en plus critiquée.

Selon des sources diplomatiques à l'ONU, l'organisation réfléchit à nommer un représentant spécial pour appuyer les efforts du président sud-africain.

L'ancien secrétaire général des Nations unies Kofi Annan, qui avait contribué à un accord politique dans la crise post-électorale au Kenya en février, les ex-présidents mozambicain et nigérian Joaquim Chissano et Olusegun Obasanjo, et le chef de l'État ghanéen John Kufuor figurent parmi les noms évoqués.