Le président russe Dmitri Medvedev a agité le spectre de «mesures de rétorsion» mercredi après la signature d'un accord américano-tchèque sur le bouclier antimissile, tandis que Washington jouait l'apaisement en proposant à Moscou une «coopération stratégique».

«La Russie ne va pas se livrer à l'hystérie, mais réfléchir à des mesures de rétorsion», a-t-il dit à l'issue du sommet du G8 à Toyako (Japon), sans s'étendre sur la nature de ces mesures.

Le nouveau président russe, plus mesuré dans la forme, n'en est pas moins apparu aussi ferme sur le fond que son prédécesseur Vladimir Poutine. La Russie affirme que ce bouclier menace sa dissuasion nucléaire, là où Washington assure vouloir parer des menaces futures de l'Iran.

Dans le cadre de cet ambitieux projet, Washington et Prague ont signé mardi un accord prévoyant l'installation d'un radar ultrapuissant en République tchèque. Doivent s'y ajouter des intercepteurs de missiles en Pologne.

La signature de l'accord «nous afflige beaucoup», a dit M. Medvedev. «Il est évident, après cette signature, qu'une nouvelle phase a commencé (...) Ce projet sera réalisé», a martelé le nouveau maître du Kremlin, qui a pris ses fonctions en mai.

Après la signature de l'accord, la Russie a déjà menacé mardi de «réagir», en cas de déploiement d'éléments de défense antimissile «près de ses frontières», par des «moyens militaires techniques».

Plus concret, le président Vladimir Poutine avait menacé de pointer des missiles russes sur l'Ukraine, la Pologne et la République tchèque si les projets d'élargissement de l'OTAN ou de déploiement du bouclier se concrétisaient dans ces pays.

En juillet 2007, Moscou avait aussi agité la menace de déployer des missiles dans l'enclave de Kaliningrad, située entre la Pologne et la Lituanie, aux portes de l'UE.

Devant les difficultés à conclure un accord avec Varsovie, Washington a entamé des discussions en juin avec la Lituanie, qui pourrait accueillir les intercepteurs, une perspective jugée «inacceptable» lundi par M. Medvedev lors de sa rencontre avec M. Bush.

Le président russe a déploré que les propositions de Moscou sur le bouclier et les négociations avec Washington pour tenter d'apaiser les inquiétudes russes n'aient débouché sur rien, tout en laissant ouverte la porte de nouvelles négociations.

«Malheureusement il n'y a pas eu de réaction. On a mené avec nous des négociations assez molles qui n'ont abouti à rien», a-t-il déploré. «Nous ne sommes pas fermés à la poursuite de négociations», a-t-il toutefois ajouté.

Au sommet du G8 d'Heiligendamm (Allemagne) en 2007, M. Poutine avait pris son homologue américain George W. Bush de court en lui proposant d'utiliser un radar russe en Azerbaïdjan plutôt que d'en construire un en République tchèque, une idée restée sans lendemain.

Les Américains ont tenté d'apaiser la Russie en lui offrant d'envoyer des inspecteurs sur les sites pour vérifier que ceux-ci ne la visent pas, mais les discussions traînent en longueur.

L'accord signé mardi à Prague limite a priori de telles missions d'inspection en mentionnant que «toute visite d'un représentant officiel d'un pays tiers est soumise à approbation des Tchèques».

Gardant le cap, Washington a «promis de continuer le dialogue» et de traiter la Russie en «égale» en l'associant dans un système antimissile, une idée déjà évoquée lors du sommet Bush-Poutine d'avril à Sotchi (Russie).

«Nous voulons mettre au point un système entre les États-Unis, la Russie et l'Europe dans lequel tout le monde participera en tant que partenaires égaux», a déclaré Gordon Johndroe, le porte-parole du Conseil national de sécurité (NSC) américain, rattaché à la Maison-Blanche, en marge du sommet du G8.