Contrairement à d'autres chefs d'État, le président français Nicolas Sarkozy profite de l'été pour se maintenir à l'avant-scène de l'actualité. En multipliant les déclarations publiques et les opinions lancées à la volée, M. Sarkozy s'assure d'une place de choix dans l'espace médiatique. Radio, télé et journaux font leurs choux gras de ses paroles, la plupart du temps hautes en couleur. Pendant ce temps, à peine moins discrète, la femme du président, Carla Bruni, continue d'exercer son immense pouvoir de séduction.

Un visiteur qui séjourne quelques semaines en France ne serait pas malavisé de conclure, en scrutant les médias, que la vie de la nation tourne autour d'un seul homme.

Difficile d'écouter la radio et les bulletins télévisés ou d'ouvrir le journal sans tomber sur une déclaration du chef de l'État, Nicolas Sarkozy, ou sur une anecdote à son sujet. À tel point que certains de ses détracteurs l'appellent «l'omniprésident».

«Il a décidé d'exercer une présidence active plutôt que représentative... C'est le moins qu'on puisse dire», ironise Denis Muzet, qui dirige un observatoire des médias.

Sarkozy, observe l'analyste, se mêle de tous les dossiers, petits et grands, tout en veillant à s'assurer une couverture qui convienne à sa «fringale médiatique». Les médias eux-mêmes, convaincus qu'il «fait vendre», en redemandent et lui donnent une visibilité sans précédent.

Bien que le «produit Sarkozy» ait un peu perdu de son éclat en 2008 en raison des crises majeures - financière, alimentaire et énergétique - qui touchent le pays, la population en redemande, relève M. Muzet.

«Les Français sont ravis de voir un président qui s'active même durant la période des vacances», résume-t-il.

Remercié par Betancourt

Les responsables des bulletins d'informations n'ont jamais à chercher bien loin pour répondre à la demande: les «événements» se succèdent à belle vitesse, comme ce fut le cas notamment en juillet.

Au début du mois, la libération de l'otage franco-colombienne Ingrid Betancourt place Nicolas Sarkozy sous les projecteurs. De Bogota, l'ex-candidate présidentielle remercie le chef d'État, qui l'accueillera en personne quelques jours plus tard, devant les caméras, à son arrivée à Paris avant de lui remettre, dans une autre cérémonie, la Légion d'honneur.

L'ex-candidate socialiste Ségolène Royal monte au créneau: elle met en garde le président contre toute tentative de récupération politique de la libération d'Ingrid Betancourt.

Au même moment, une polémique éclate autour d'une déclaration du président sur la programmation de la télévision publique française, qui reflète trop, selon lui, celle de la télévision privée. Le président des chaînes publiques s'insurge et dénonce ce parallèle «stupide» et «injuste».

Polémique encore lorsque le chef d'État, pour illustrer l'évolution «positive» de la France, déclare devant son parti que, lorsqu'il y a une grève, «plus personne ne s'en aperçoit». Les syndicats, outrés, le préviennent de ne pas jouer avec le feu.

Une polémique chasse l'autre

Sarkozy suscite une autre controverse en parlant de «l'amateurisme» de l'armée après qu'un soldat eut ouvert le feu avec de vraies balles au cours de ce qui devait être une simulation à Carcassonne. Le président transmettra peu de temps après une lettre assurant les troupes françaises de son «amitié».

À la veille de la fête nationale, Nicolas Sarkozy réussit à réunir à Paris une quarantaine de chefs d'État pour lancer son projet d'Union pour la Méditerranée. Il écarte les critiques relatives à la présence du dictateur syrien Bachar el-Assad, longtemps persona non grata sur la scène internationale. Et suscite une nouvelle polémique en le plaçant aux premières loges lors du défilé traditionnel de l'armée.

La semaine dernière, Nicolas Sarkozy est de nouveau au centre de l'actualité, cette fois en raison d'une réforme constitutionnelle passée à l'arraché par quelques voix de majorité. Le président français pourra désormais s'exprimer exceptionnellement devant les députés et les sénateurs réunis au cours d'une séance qui promet, elle aussi, d'être largement médiatisée.

Les socialistes ont tenté en vain de faire inclure dans la réforme une mesure visant à comptabiliser le temps d'antenne du président. Ils souhaitent que le Conseil supérieur de l'audiovisuel, chargé d'assurer un certain équilibre de la couverture médiatique, ménage une plus grande place à l'opposition, grandement fragilisée par ses divisons internes.

En vacances avec Carla

L'année dernière, Sarkozy était resté à l'avant-scène médiatique durant les vacances, en août. Son séjour annoncé dans le New Hampshire, aux États-Unis, avait généré une large couverture, tellement qu'il avait pris à partie deux photographes trop enthousiastes à son goût.

Cette année, M. Sarkozy prévoit séjourner en France, dans le Var, avec sa très médiatique conjointe Carla Bruni. L'ex-top-model devenue chanteuse a distribué cette semaine son plus récent album à tous les ministres et secrétaires d'État du gouvernement à l'occasion d'un «pot» convoqué par son mari à l'Élysée.

Denis Muzet est convaincu que le politicien trouvera une façon de se rappeler à la mémoire de ses concitoyens dans les semaines qui viennent même si ses plans s'annoncent moins «exotiques» que l'année dernière.

«Il va sans doute profiter des vacances pour écrire un nouveau feuilleton... L'été est une période propice à l'écoute des feuilletons», conclut l'analyste.