Ce n'est peut-être qu'un bluff, mais il met l'administration Bush dans l'embarras : pour la première fois, le gouvernement irakien réclame un calendrier de retrait des troupes américaines présentes en Irak. Du même coup, il s'invite dans la campagne présidentielle des États-Unis, où l'Irak est un thème majeur.

La demande de Bagdad s'inscrit dans ses négociations avec Washington sur un pacte de sécurité qui doit remplacer le mandat de l'ONU légitimant la présence actuelle des troupes américaines en Irak. Ce mandat expirera le 31 décembre.

«Nous ne pouvons conclure de protocole d'accord avec des forces étrangères en l'absence de dates et d'horizons clairs pour leur départ. Nous parlons sans équivoque de leur départ», a déclaré hier Mouaffak al-Roubaïe, conseiller à la sécurité nationale du gouvernement irakien.

Le conseiller a fait cette déclaration après avoir rencontré dans la ville sainte de Nadjaf le grand ayatollah Ali Sistani. La veille, le premier ministre irakien avait donné la première indication du raidissement de son gouvernement, évoquant pour la première fois l'idée d'un calendrier de retrait des troupes américaines.

«Aujourd'hui, nous examinons la possibilité de mettre fin à la présence étrangère sur le territoire irakien et de rétablir une entière souveraineté», a déclaré Nouri al-Maliki à des diplomates arabes lors d'une visite aux Émirats arabes unis.

«Dans tous les cas de figure, le fondement de l'accord sera le respect de la pleine souveraineté de l'Irak. Actuellement, on vise à aboutir à un protocole d'accord soit sur le départ des forces, soit sur un calendrier de retrait.»

Au lendemain de la déclaration de Maliki, la Maison-Blanche a refusé d'évoquer un calendrier de retrait. Jusqu'à présent, George W. Bush s'est toujours opposé à cette idée.

«Les négociations et les discussions sont en cours. Il est important de comprendre qu'il ne s'agit pas de discussions sur une date ferme de retrait», a déclaré Gordon Johndroe, porte-parole de la Maison-Blanche en marge du sommet du G8 au Japon.

L'administration Bush souhaitait en venir à une entente avec l'Irak d'ici à la fin du mois, ce qui semble de moins en moins réaliste. De nombreux obstacles séparent les deux parties. Bagdad s'oppose notamment à tout compromis conférant aux soldats américains une immunité au regard de la loi irakienne.

Le durcissement de Bagdad vis-à-vis de Washington a eu sa répercussion dans la campagne présidentielle. Le candidat républicain John McCain a averti hier que le retrait des militaires américains dépendait des conditions de sécurité sur place.

«J'ai toujours dit que nous reviendrions à la maison armés de l'honneur et de la victoire, et non en fonction d'un calendrier», a déclaré le sénateur de l'Arizona.

Partisan d'un retrait des unités de combat américaines en 16 mois, le candidat démocrate Barack Obama s'est pour sa part réjoui de la demande du gouvernement irakien.

«Je pense qu'il est encourageant que le premier ministre (irakien) lui-même reconnaisse qu'en coopération avec l'Irak, il est temps pour les forces armées américaines de commencer à évoquer le calendrier de retrait», a-t-il dit lundi.