Les jurés militaires du procès de Salim Hamdan ont été plongés mercredi dans le quotidien du chef d'Al-Qaeda, Oussama ben Laden entre 1998 et 2001, période pendant laquelle l'accusé jouait un rôle mineur d'employé, pas au courant des attentats à venir.

Cité par l'accusation, Ali Sufan, un agent du FBI expert de l'organisation terroriste Al-Qaeda, qui parle couramment arabe et a interrogé plusieurs fois l'accusé en 2002 et 2003, a détaillé les relations qui existaient entre le chef d' Al-Qaedaet son chauffeur.

Le premier échange entre les deux hommes a été plutôt confiant puisque M. Hamdan vient de la même région du Yémen que le père de ben Laden, a-t-il témoigné. Selon lui, il existait autour du chef terroriste une petite cour de fidèles employés qui s'entendaient très bien entre eux, lui vouaient une admiration sans borne et en lesquels il avait une absolue confiance.

Ainsi en était de Salim Hamdan, âgé aujourd'hui d'une quarantaine d'années, dont plus de six enfermé à Guantanamo, et qui a épousé en 1999 la soeur d'un autre employé, sur les conseils du chef terroriste.

«Il a été choisi par ben Laden» comme chauffeur, «parfois le principal, parfois non» mais «les choses étaient très fluides», a détaillé M. Sufan.

Au fil des questions du procureur John Murphy, le témoin a suivi la chronologie des événements.

Sur les attentats contre les ambassades du Kenya et de Tanzanie en 1998, l'accusé a «entendu une conversation» entre ben Laden et un de ses lieutenants. Mais ce n'est qu'après, que M. Hamdan «a vu et entendu des responsables d'Al-Qaeda regarder une vidéo et décrire les erreurs tactiques qui avaient été faites», a encore témoigné Ali Sufan.

«M. Hamdan a compris qu'ils étaient impliqués dans Al-Qaeda et dans les attentats? Est-il parti?», a interrogé le procureur. «Non», a répondu M. Sufan.

M. Hamdan était au Yémen quand il a entendu parler de l'attentat sur le navire américain USS Cole, en 2000. Quand il a repris son service auprès de ben Laden et lui a dit qu'il pensait qu'Al-Qaedan'était pas derrière cette attaque, celui-ci a explicitement souri, a encore rapporté M. Sufan.

Quant aux attentats du 11 septembre, comme souvent puisqu'il organisait les allées et venues d'un endroit à l'autre de l'Afghanistan, M. Hamdan savait «qu'une opération était en cours et qu'ils allaient devoir partir», a encore décrit M. Sufan.

Kaboul d'abord, puis Jalalabad. «Ben Laden disait il faut partir et on s'arrête là», sans partager avec personne, pas même ses fidèles, le secret de chaque destination, a-t-il encore expliqué.

Au cours de l'un de ces trajets, M. Hamdan a entendu sur le siège arrière une conversation pendant laquelle «ben Laden était content du résultat» des attentats et se réjouissait d'avoir «tué plus de personnes que prévu». Puis, une autre conversation sur le «quatrième avion» qui «aurait pu avoir le dôme».

Le 11 septembre, outre les 3 avions qui ont frappé les tours du World Trade center à New York et le Pentagone, un quatrième avion s'est écrasé en Pennsylvannie (est). L'objectif des pirates de l'air semble avoir été le Capitole à Washington, pourvu d'un dôme.

«L'accusation se concentre sur le fait qu'il savait. S'il avait fourni des informations, peut-être que quelque chose aurait pu être fait», a commenté devant la presse Matt Pollard, observateur d'Amnesty international qui suit le procès.

Selon lui, même sans participer à aucune activité opérationnelle, le simple fait de travailler pour un terroriste contitue un «soutien matériel au terrorisme», un des chefs d'accusation qui pèse sur M. Hamdan, avec celui de «complot».

L'air fatigué, parfois désespéré, M. Hamdan qui risque la prison à vie a écouté ce témoignage en silence, attendant que ses avocats prennent la suite de l'interrogatoire, dans l'après-midi.