L'ex-otage libérée, la Franco-colombienne Ingrid Betancourt, a raconté mercredi lors de son arrivée à l'aéroport militaire de Bogota, «les conditions surréalistes» de sa libération par l'armée colombienne.

«Les conditions de nos libérations ont été complétement surréalistes», a affirmé Ingrid Betancourt avant d'en faire le récit.

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«Nous étions levés depuis cinq heures du matin, a-t-elle indiqué. Ils (les geôliers des Farc) nous avaient demandé de ranger nos affaires et ils nous ont fait attendre toute la matinée en nous disant qu'ils ignoraient ce qui allait se passer».

Selon le déroulement de cette opération présenté par le ministre colombien de la Défense Juan Manuel Santos, l'armée avait infiltré des hommes parmi les guérilleros des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc-marxistes) chargés de surveiller les otages. Ces derniers étaient parvenus à faire croire aux geôliers des Farc que des dirigeants de l'état-major des rebelles voulaient rencontrer les otages et qu'il fallait dans cet objectif les regrouper.

«Une heure avant que les hélicoptères n'arrivent, j'ai parlé avec le commandant (des Farc) Asprilla et il m'a dit que nous allions tous monter dans un hélicoptère et que nous irions dans un endroit qu'il ne connaissait pas pour parler avec un dirigeant des Farc. Asprilla pensait qu'il s'agissait d'Alfonso Cano (le nouveau chef des rebelles)», a-t-elle dit.

«Quand les deux hélicoptères blancs sont arrivés, et je dois confesser que j'ai ressenti quelque chose d'étrange parce que normalement lorsque nous entendions les hélicoptères arriver nous sortions en courant pour nous cacher. Et cette fois ils étaient devant nous et nous attendions tranquillement qu'ils atterrissent», a indiqué Ingrid Betancourt, vêtue d'un treillis militaire et les cheveux noués sur la nuque.

Un seul des deux hélicoptères s'est posé, selon les militaires colombiens, et le second est reparti.

«Quand les passagers de l'hélicoptère sont descendus, a-t-elle poursuivi, la confusion a été totale. C'étaient des membres des Farc, ils étaient avec eux, certains même avaient des chemises à l'effigie du Che Guevara».

Le commandant des forces militaires colombiennes, le général Freddy Padilla a pour sa part révélé que seul l'hélicoptère utilisé pour la libération avait à son bord deux pilotes, deux navigateurs militaires ainsi que neuf membres des forces spéciales.

«Nous sommes montés à bord avec beaucoup de difficulté car ils nous avaient lié les mains, ce qui était humiliant, puis après être montés ils nous ont attaché les pieds (....). Ils ont alors fermé les portes de l'hélicoptère, et tout à coup j'ai vu le commandant (Farc) nu au sol. Je n'ai pas même ressenti de bonheur à ce moment», a ajouté l'ex-otage soulignant que ce guérillero l'avait personnellement humiliée à de nombreuses reprises pendant sa captivité.

«Après avoir neutralisé les deux commandants Farc qui étaient montés avec nous dans l'hélicoptère, le chef de l'opération a crié: 'Nous sommes l'armée nationale, vous êtes libres'».

«A ce moment, nous avons ri, sauté de joie, je pensais que c'était un miracle».

«L'opération militaire de l'armée de mon pays a été parfaite», a conclu l'ancienne candidate présidentielle des verts qui a rendu hommage au président colombien colombien Alvaro Uribe.

Le ministre de la Défense Santos a estimé que cette opération de sauvetage des otages s'était déroulée «comme dans un film».

De son coté, le général Padilla a, dans un discours public, précisé qu'au cours de l'opération de libération «il n'y a pas eu un seul tir, pas un seul blessé».

Ingrid Betancourt a aussi remercié le président français Nicolas Sarkozy, son prédécesseur Jacques Chirac et son «ami» l'ancien premier ministre Dominique de Villepin.

«Je veux (...) dire merci au président Sarkozy qui a tant lutté pour moi, avec ma famille, mes enfants, avec maman, ma soeur», a déclaré Ingrid Betancourt, otage depuis plus de six ans.

«Je suis Colombienne mais je suis Française», avait auparavant affirmé Mme Betancourt.