Nouvelles critiques contre la BCE (Banque centrale européenne), invitation faite aux négociateurs européens de «taper du poing sur la table» pour protéger l'économie européenne et rappel à l'ordre des pays réticents à ratifier le «mini-traité» de Lisbonne: Nicolas Sarkozy s'est montré à nouveau exigeant à l'égard de l'Union européenne, même s'il a remercié José Manuel Barroso pour le soutien de la Commission à une baisse de la TVA (taxe sur la valeur ajoutée)pour la restauration en France.

Le président français, qui s'exprimait samedi devant le conseil national de l'UMP comme les deux autres «têtes» de l'Union, les présidents de la Commission José Manuel Barroso et du Parlement Hans-Gert Pottering, s'est de nouveau fait le chantre de la «réciprocité» en matière d'échanges internationaux, pour mieux protéger les secteurs les plus fortement exposés à la concurrence internationale.

«Que les négociateurs de l'Europe n'aient pas peur de taper du poing sur la table», a-t-il souhaité, faisant allusion aux négations en cours au sein de l'OMC et aux pays «qui aimeraient qu'on abaisse toutes nos barrières tarifaires pour qu'ils exportent leurs produits agricoles, mais qui ne sont pas capables d'abaisser une seule de leurs barrières tarifaires sur leurs services et sur leur industrie».

«La réciprocité doit être la politique européenne, point à la ligne!», a lancé le président français, sans toutefois citer le commissaire Peter Mandelson, qu'il a plusieurs fois accusé d'avoir accepté des concessions disproportionnées. Ce dernier avait d'ailleurs boudé mardi un dîner offert à l'Élysée.

«N'imposons pas à nos agriculteurs et à nos éleveurs ce qu'on n'est pas capables d'imposer à ceux dont on importe les produits», a-t-il décliné. Sur la réforme de la PAC, on «peut rassembler l'Europe», a-t-il affiché. Prêt «à tous les compromis», Nicolas Sarkozy a cependant posé un cadre précis: la diminution des subventions versées aux agriculteurs doit passer par «la préférence communautaire», seule capable de «garantir des prix» satisfaisants aux producteurs. «C'est les prix ou les subventions», a-t-il prévenu.

Dans la même veine, le président français s'en est de nouveau pris à la Banque centrale européenne qu'il accuse de pénaliser l'économie du continent en choisissant d'élever ses taux d'intérêt très nettement au-dessus des taux américains. «Est-il normal qu'alors que l'Europe est confrontée au dumping environnemental, social, fiscal, on doive en plus subir un dumping monétaire qui met à genoux les entreprises européennes qui veulent continuer à exporter?», a-t-il interrogé. En marge de son intervention, M. Barroso a répondu en insistant sur l'importance de la lutte contre l'inflation, estimant qu'il y avait lieu de faire «confiance» à la BCE.

Ce désaccord n'a pas empêché le président de la Commission de recevoir les remerciements de son hôte pour la proposition de la Commission de présenter un projet de directive qui permettrait notamment à la France d'appliquer une TVA (taxe sur la valeur ajoutée) réduite à partir de 2011. La décision nécessite cependant l'unanimité des États-membres, ce qui a toujours échoué jusqu'ici. M. Sarkozy a maintenu son ambition d'obtenir également un taux réduit pour les vidéos et les disques. Pour les produits écologiques, il a prudemment renvoyé à plus tard un débat mal engagé.

Revenant sur le rejet du traité de Lisbonne par les électeurs irlandais, le nouveau président du Conseil européen, qui ira à Dublin le 21 juillet, a assuré de son engagement pour «essayer de résoudre» la crise et convaincre les autres pays de poursuivre la ratification. «Il nous faut faire un effort collectivement, terminer le processus de ratification», a appuyé M. Barroso.

Au président polonais Lech Kaczynski, qui a menacé d'interrompre le processus, Nicolas Sarkozy a rappelé qu'il avait lui-même négocié et accepté le traité. «Il a signé à Bruxelles et il doit signer à Varsovie. C'est une question de morale». Quant à la République tchèque et à la Suède, particulièrement eurosceptiques et qui prendront la présidence européenne tour à tour après la France, M. Sarkozy leur a proposé de «gérer à trois la présidence française», de façon à les obliger à s'impliquer dans la résolution de la crise. «Nous avons proposé à trois une présidence de 18 mois qui me paraît beaucoup plus efficace qu'une présidence de six mois», a-t-il affirmé.