Partagée entre famille et virus de la politique, Ingrid Betancourt, qui s'est engagée à poursuivre la lutte pour la libération des otages encore détenus par les Farc, paraît avoir un avenir prometteur, peut-être même aux côtés de l'actuel président colombien Alvaro Uribe.

À 46 ans, l'ancienne candidate à la présidence de la Colombie, propulsée par les médias au rang d'héroïne au jugement lucide et aux nerfs d'acier, est apparue jeudi à Bogota sensible et émouvante mais toujours animée d'ambitions politiques.

Ingrid Betancourt se transforme rapidement, au surlendemain de sa libération par un commando de l'armée, en une personnalité avec une présence internationale et une image nationale très forte, explique à l'AFP Alejo Vargas, un analyste de renom, professeur à l'Université nationale.

Néanmoins, Ingrid Betancourt a réaffirmé qu'après plus de six années passées dans la jungle aux mains de la guérilla des Farc (Forces armées révolutionnaires de Colombie, marxistes), elle voulait se recentrer sur sa famille et faire une pause avec ses enfants Mélanie et Lorenzo et ne pas prendre d'engagement sans leur accord.

«Je viens de sortir de la jungle, je n'ai pas eu le temps de réfléchir à cela (son avenir), j'ai pris la décision de travailler pour ceux qui sont encore dans la jungle», a-t-elle annoncé mercredi dès son arrivée à Bogota.

«Je suis en dette avec ma famille, avec ma fille», a confié Mme Betancourt, faisant référence à ses enfants, qui avaient 13 et 18 ans lors de son enlèvement en 2002 et reconnaissant qu'elle avait «pris des décisions qui les ont fait beaucoup souffrir».

L'ancienne sénatrice, longtemps considérée comme un animal politique, assure vouloir maintenant «que l'avenir puisse être décidé en accord» avec ses enfants.

Toutefois, en une journée à Bogota, l'ancienne candidate écologiste à la présidence de Colombie a déjà lancé qu'elle soutenait une éventuelle réélection du président Alvaro Uribe pour un troisième mandat.

«Une troisième élection ! Pourquoi pas ? Cela me paraît intéressant, cela me plaît, la continuité», a-t-elle lâché durant une conférence de presse. Ce soutien à M. Uribe a renforcé les rumeurs des médias selon lesquelles Ingrid pourrait devenir ministre des Affaires Etrangères.

Sur le plan international, Mme Betancourt n'a pas perdu de temps et a lancé un appel au président équatorien, Rafael Correa, pour qu'il surmonte ses divergences avec le président Uribe et l'aide à la libération des otages qui demeurent encore aux mains des Farc.

«Je peux seulement dire au président (Correa) qu'il ait bien conscience qu'il y a encore des otages qui sont dans la jungle», a déclaré Ingrid Betancourt à l'AFP.

L'ex-otage a aussi demandé la coopération du président Vénézuélien Hugo Chavez pour libérer les otages. Ce dernier a aussitôt répondu positivement en réitérant que les Farc devaient déposer les armes.

La plupart des analystes colombiens prédisent déja à l'ancienne candidate à la présidence un avenir politique, évoquant pour certains un ministère ou rien de moins que la présidence de son pays.

«Le meilleur scénario serait le ministère des Affaires étrangères», a déclaré à l'AFP le politologue Fernando Cano.

«Quoi de mieux pour le gouvernement Uribe que de pouvoir compter sur cette femme symbole de l'enlèvement en Colombie et à la réputation internationale?», poursuit le professeur de l'Université de Rosario.

«Il n'y a aucun doute que le panorama politique change avec l'arrivée d'un nouvel acteur de grand poids politique», explique Alejo Vargas.

Avant, Ingrid Betancourt était une figure politique nationale, «maintenant il s'agit d'une personnalité avec une très grande présence internationale et une image nationale très forte», a-t-il souligné.

L'analyste assure que l'ex-otage détenue durant plus de six ans par la guérilla et donnée comme à l'article de la mort à plusieurs reprises est «très probablement» une candidate très crédible à la présidence de son pays.