Menacé par quatre partis de gauche qui s'opposent farouchement à l'accord que l'Inde a conclu avec les États-Unis sur le nucléaire civil, le gouvernement indien a réussi à survivre hier à un vote de confiance du Parlement. Mais la journée ne fut pas de tout repos.

Le scrutin a eu lieu après une grande confusion causée par des allégations de l'opposition selon lesquelles le gouvernement aurait corrompu des députés pour influer sur le vote.

« Au cours des trois ou quatre derniers jours, il y a eu des pressions sur nos parlementaires pour qu'ils acceptent de l'argent et s'abstiennent ou votent pour le gouvernement », a dit le président du principal parti d'opposition, le Bharatiya Janata Party (BJP), Rajnath Singh, demandant du même coup la démission du premier ministre, Manmohan Singh.

Il a assuré que son parti avait des preuves sur vidéo de la remise de sommes d'argent. « Jamais dans l'histoire de notre Parlement un scandale aussi honteux et révoltant ne s'est produit », a-t-il déclaré.

Un député du BJP, Ashok Argal, a interrompu le débat en exhibant des sacs bourrés de billets de banque, qui, selon lui, contenait 30 millions de roupies, soit l'équivalent de 715 000 $. Il a affirmé que cet argent lui avait été donné afin qu'il s'abstienne lors du vote de confiance. Deux autres députés du BJP ont lancé des accusations identiques.

Les accusations de corruption ont été rejetées du revers de la main par la majorité des députés et le vote a eu lieu avec plusieurs heures de retard.

Victoire claire, mais enquête demandée

À l'issue du vote, le président du Parlement, Somnath Chatterjee, a confirmé la victoire du gouvernement de Manmohan Singh. 275 députés ont voté en faveur du gouvernement en place et 256 ont voté contre. Certains votes ont dû être comptés manuellement, car ils n'avaient apparemment pas été enregistrés correctement par le système de vote électronique.

M. Chatterjee n'a pas indiqué le nombre des abstentions. Initialement, les résultats du vote électronique, transmis par la chaîne de télévision du parlement, donnaient 253 députés pour la confiance, 232 contre et deux abstentions. Il a aussi indiqué qu'une enquête sera ouverte sur les allégations de corruption,

Après l'annonce du résultat, des membres du gouvernement ont félicité Manmohan Singh, souriant, et le chef du Parti du Congrès au pouvoir, Sonia Gandhi.

Le vote de confiance avait été organisé en raison de la décision du Parti communiste et de trois partis d'extrême gauche de mettre fin au soutien parlementaire qu'ils accordaient jusque là au gouvernement de coalition de Manmohan Singh. Ces partis, qui disposent de 59 des 545 sièges au Parlement, avaient annoncé le retrait de leur soutien le 8 juillet, pour manifester leur hostilité à l'accord sur le nucléaire civil conclu par New Delhi et Washington en 2007.

Ces formations et le principal parti de l'opposition, le Bharatiya Janata Party (BJP), estiment que l'accord lie trop étroitement l'Inde aux États-Unis et qu'il risque de compromettre le programme nucléaire militaire indien.

Au cours des débats, des responsables du gouvernement ont déclaré que l'Inde, un pays de 1,1 milliard d'habitants, avait absolument besoin du nucléaire pour satisfaire ses besoins croissants en énergie.

Le feu vert qu'a reçu le gouvernement indien hier n'est pas passé inaperçu à Washington. La Maison-Blanche a enjoint l'Inde à ratifier le plus vite possible l'entente puisque l'accord doit être ensuite accepté par le Congrès américain. Et à l'approche des élections de l'automne aux États-Unis, le temps est compté. « Il ne reste plus beaucoup de jours pendant lesquels le Congrès sera en session », a relevé la porte-parole de la Maison-Blanche Dana Perino.